Réforme constitutionnelle en Tunisie : la Commission de Venise fait part de ses réserves


La Commission de Venise a rendu, vendredi 27 mai 2022, un «avis urgent» sur le cadre constitutionnel et législatif concernant le référendum du 25 juillet sur la réforme constitutionnelle et les élections législatives anticipées du 17 décembre en Tunisie.

Ces deux rendez-vous ont été annoncés par le président de la république, Kaïs Saïed, qui a aussi émis un décret-loi n° 2019-2019. 2022-22 modifiant et complétant la loi organique n°23 relative à l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie).

Dans ce document, préparé à la demande de la délégation de l’Union européenne en Tunisie, la Commission de Venise estime que l’abrogation du décret-loi n° 2022-22 modifiant et complétant la loi sur l’autorité électorale (Isie) est «indispensable pour la légitimité et la crédibilité de tout processus électoral ou référendum».

Selon la Commission de Venise, les élections devraient être organisées par l’Isie «dans sa composition antérieure au décret-loi n° 2022-22».

Concernant le référendum du 25 juillet sur la nouvelle constitution en cours de préparation, la Commission de Venise considère qu‘«il n’est pas réaliste d’envisager d’organiser un référendum constitutionnel de manière crédible et légitime en l’absence de règles claires, établies longtemps à l’avance, sur les modalités et les conséquences de la tenue d’un tel référendum». Il suggère de «prolonger le délai de préparation des amendements constitutionnels et de reporter la date du référendum en conséquence».

La Commission considère qu’avant tout référendum, «des élections législatives doivent être organisées dans les meilleurs délais, afin de rétablir l’existence du pouvoir parlementaire.»

Une large consultation impliquant forces politiques et société civile

Elle préconise, en ce sens, une large consultation impliquant les forces politiques et la société civile pour «parvenir à un consensus sur les nouvelles règles électorales».

La Commission de Venise estime nécessaire, également, de constituer un comité véritablement représentatif de toutes les forces politiques et de l’ensemble de la société tunisienne et de lui confier la préparation et l’adoption du texte à soumettre au référendum.

Une autre recommandation faite est de préciser si le référendum est décisionnel ou consultatif, et quelles en seront les conséquences.

Il faut, poursuit la Commission de Venise, prévoir expressément qu’en cas de rejet du nouveau projet de loi fondamentale, «la Constitution de 2014 restera en vigueur jusqu’à son éventuelle modification par la Chambre des représentants du peuple nouvellement élue».

Autoriser l’observation internationale du référendum

La commission propose également d’autoriser l’observation internationale du référendum. Et tout en admettant qu’elle n’est pas compétente pour statuer sur la constitutionnalité des lois ou des décrets-lois en lieu et place d’une cour constitutionnelle, la commission rappelle qu’en Tunisie, «la cour constitutionnelle n’a jamais été créée, malgré l’existence d’une disposition constitutionnelle expresse».

Dans son rapport, la Commission de Venise reconnaît pleinement «le droit souverain du peuple tunisien à refondre ou amender la Constitution de 2014 et affirme qu’elle n’a pas le droit de prendre position sur les choix politiques inhérents à toute révision constitutionnelle majeure.»

Elle rappelle que sa mission est d’examiner la conformité des contenus et des processus de réforme constitutionnelle avec les normes et valeurs internationales de la démocratie, de l’Etat de droit et du respect des droits fondamentaux que ses Etats membres, dont la Tunisie, se sont engagés à respecter.

D’après Tap.

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