Toute surenchère remettant en cause le partage de la Palestine tracé par la légalité internationale et endossé par les différentes initiatives diplomatiques de la Ligue des Etats arabes finit par faire le jeu de l’extrême-droite israélienne qui prétend ne pouvoir faire la paix avec les Arabes faute d’un interlocuteur sérieux. (La poignée de main sur la pelouse de la Maison-Blanche à Washington, le 13 septembre 1993, entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat sous le regard complice de Bill Clinton).
Par Elyes Kasri *
Dans les relations internationales et surtout les affaires de libération nationale, les peuples sont considérés souverains en ce qui concerne les modalités de leur lutte pour leur libération nationale. Concernant la Palestine, l’Autorité Palestinienne est considérée par la communauté internationale et surtout la Ligue des Etats Arabes comme l’unique représentant légal du peuple palestinien.
Aussi, à moins d’un agenda particulier, les Etats qui veulent aider le peuple palestinien sont dans l’obligation morale et politique de coordonner leur assistance au peuple palestinien avec son représentant légal qui n’a pas émis, en l’occurrence, de réserves sur la dernière résolution du conseil des ministres de la Ligue des Etats arabes (Le Caire, 11 octobre 2023) et se garde d’exiger la libération totale de la Palestine historique mais plutôt la mise en œuvre de la formule des deux Etats selon le plan de partage de l’Onu de 1947 et les aménagements prévus par les résolutions 242 et 338 du Conseil de Sécurité ainsi que les initiatives de paix arabes.
Hamas, une création des renseignements israéliens
Toute surenchère remettant en cause le partage de la Palestine tracé par la légalité internationale et endossé par les différentes initiatives diplomatiques de la Ligue des Etats arabes finit par faire le jeu de l’extrême-droite israélienne qui prétend ne pouvoir faire la paix avec les Arabes faute d’un interlocuteur sérieux.
Ceux qui prétendent que l’affaiblissement d’Israël offre une opportunité propice pour se débarrasser une fois pour toutes de cette «greffe coloniale sioniste», oublient qu’Israël n’est jamais aussi fort du soutien inconditionnel international que dans ses moments de faiblesse apparente et son assimilation au personnage de David face à un Goliath arabe et plus récemment islamiste avec un visage hideux de conquérant sanguinaire et revanchard.
Quant à Hamas, en dépit de l’exploit tactique réalisé par l’opération «Déluge d’Al Aqsa», il faut se rappeler les nombreux témoignages sur le rôle actif joué par les autorités israéliennes et leurs services de renseignement dans sa création en vue de diviser les rangs palestiniens et conférer une dimension islamiste à la cause palestinienne, permettant ainsi à la propagande israélienne de rallier le soutien de l’Occident dans «la défense de la civilisation et des valeurs judéo-chrétiennes».
Revenir à la politique des étapes
A trop vouloir soutenir une cause de libération nationale, aussi nobles soient les émotions et les intentions, on risque de l’affaiblir en donnant l’impression de discréditer et de délégitimer, par une surenchère voulue ou inconsciente, les représentants considérés légaux de ce peuple.
Comme la Tunisie a choisi en 1955 la politique de libération par étapes, en rejetant toute interférence amicale ou fraternelle étrangères, il lui incombe de respecter les décisions parfois amères de la direction palestinienne qui se trouve confrontée non seulement à un ennemi implacable appuyé par une propagande internationale redoutable, mais également aux coups de poignard des frères arabes et voisins persans par manque de coordination ou une surenchère qui relève plus de l’instrumentalisation que du soutien.
* Ancien ambassadeur.
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