Au moment où l’extrême droite est en train de remettre sur la table la question de l’immigration, désormais présentée comme un mal absolu, il est essentiel de rappeler aux Français que leur nation s’est construite et enrichie à travers des vagues successives d’immigration. Et que c’est cette France-là qui est aujourd’hui menacée par la montée de la xénophobie et du racisme.
Khémaïs Gharbi *
Le débat d’hier soir, mardi 25 juin 2024, sur la chaîne TF1, a mis en lumière les préoccupations profondes des Français à quelques jours des élections législatives anticipées décrétées par le président de la république Emmanuel Macron. Alors que la discussion principale portait sur les défis économiques, l’endettement massif du pays et les réformes structurelles, la question de l’immigration a trouvé comme d’habitude une place centrale dans les sujets traités.
Ce débat, toujours passionnant, voit souvent les politiciens exploiter les craintes liées à l’immigration pour tirer profit des peurs populaires, parfois justifiées mais souvent amplifiées par des agitateurs politiques. Cependant, cette fois-ci, le représentant du Rassemblement National (RN) a franchi une ligne dangereuse en proposant une loi interdisant aux citoyens binationaux d’occuper des postes sensibles s’il devenait Premier Ministre. Une telle déclaration ne peut passer inaperçue et suscitera sans aucun doute de vives réactions dans les médias cette semaine. C’est une proposition qui risque de diviser la population et de créer de la tension au sein de la classe politique française. Car elle risque non seulement de discriminer injustement les citoyens, mais aussi d’engendrer des soupçons infondés. En réalité, tout candidat, qu’il ait une ou deux nationalités, subit des vérifications approfondies avant d’accéder à des postes, sensibles ou pas.
Il semble évident que cette mesure projetée par le RN est davantage motivée par des considérations électoralistes que par une réelle nécessité sécuritaire ou économique. À l’approche des élections, il est crucial d’évaluer son impact sur les trois millions et demi de binationaux en France.
Les enjeux de ce vote promettent d’être historiques, pouvant redéfinir l’avenir de l’Europe tout entière et de ses valeurs fondamentales. Les résultats pourraient également entraîner des changements significatifs, façonnant ainsi le paysage politique européen pour les années à venir.
À l’heure actuelle, il est essentiel de reconnaître que la nation française s’est construite et enrichie à travers des vagues successives d’immigration. En effet, on estime qu’environ un tiers de la population française, soit près de 19 millions de personnes, a au moins un parent d’origine étrangère. Ce syncrétisme culturel et ce métissage social ont forgé l’identité de la France, en lui apportant une diversité sans pareille.
C’est précisément cette mosaïque de cultures et de traditions qui constitue la véritable richesse de la France. Les échanges interculturels, le partage des connaissances et des expériences ont permis de bâtir un pays fort, ouvert aux différences et aux innovations.
Ainsi, l’histoire de la France est profondément marquée par ces apports divers, qui ont contribué à sa grandeur et à sa renommée mondiale. Il est donc indéniable que l’unité dans la diversité a été et demeure un moteur essentiel de l’identité nationale française, en faisant de la France un creuset de civilisations et un exemple de coexistence harmonieuse. C’est l’avenir de cette France-là qui est aujourd’hui menacé par la montée de l’extrême droite xénophobe et raciste.
* Ecrivain et traducteur.