Il n’y a pas une journée plus propice que celle du 13 août, consacrée à la célébration de la journée nationale de la femme, pour parler d’un fléau social en Tunisie qui s’appelle féminicide. Le fait que deux jours auparavant, le 11 août, un forcené ait tué son épouse et sa belle-mère à la cité Ennasr, au nord de Tunis, montre que les femmes sont menacées tous les jours dans leur vie même.
A la veille de la Journée nationale de la femme tunisienne, célébrant le 68e anniversaire de l’entrée en vigueur du Code du statut personnel, révolutionnaire pour l’époque en matière de droits des femmes dans un pays arabe, l’association tunisienne Aswat Nissa a déploré, dans un communiqué , «le climat populiste-conservateur et autoritaire qui règne en Tunisie et qui génère un niveau de violence sans précédent à l’égard des femmes», en rappelant que 13 féminicides ont été commis depuis le début de l’année jusqu’au 9 août. Avec le double féminicide d’avant-hier, ce chiffre s’élève à 15 en moins de 8 mois, soit une moyenne de 2 féminicides par mois. Trop, c’est trop! La société tunisienne est vraiment malade, et des soins doivent lui être apportés d’urgence.
L’association dénonce une politique laxiste et inefficace qui non seulement ne lutte pas contre le phénomène, mais instaure au contraire l’impunité et prive les femmes victimes de violences de la protection qu’elles réclament.
«La société civile continue de mettre en garde contre le phénomène et demande aux autorités d’engager une politique sérieuse et efficace contre les violences faites aux femmes, mais l’État, le ministère de la Femme en l’occurrence, fait la sourde oreille et se contente d’inaugurations folkloriques de des centres d’accueil dont la performance est loin d’être suffisante», rapporte Aswat Nissa.
Evoquant le récent double féminicide commis à Zahrouni, à l’ouest de Tunis, et l’augmentation alarmante du nombre de victimes cette année, l’association estime qu’il ne s’agit pas d’épisodes isolés mais «du résultat d’un discours de haine banalisé» et que «le phénomène est un indicateur de la détérioration des droits des femmes en Tunisie».
Enfin, elle exhorte les autorités à agir rapidement, en augmentant les foyers de protection et en fournissant des services d’assistance et de protection aux femmes victimes ou menacées de violences.
Aswat Nissa appelle également les autorités à prendre des mesures immédiates pour lutter contre ce phénomène croissant, lutter contre les discours de haine à l’égard des femmes et renforcer les lois dissuasives. «Il est nécessaire d’entreprendre un travail de sensibilisation au respect des droits des femmes et de diffuser une culture d’égalité et de non-violence, d’encourager le respect du caractère sacré physique et moral de la femme et de préserver sa dignité», conclut le communiqué.
I. B.