L’Autriche exige que tous les migrants secourus en Méditerranée soient placés dans des «centres d’accueil» en Tunisie et en Egypte.
Par Marwan Chahla
L’Autriche, on le sait, est un fervent partisan de la fermeture de la route migratoire de l’ouest des Balkans, et son chef de la diplomatie, Sebastian Kurz, a fait cette proposition faite, cette semaine, à ses partenaires de l’Union européenne (UE), en prévision de ce qu’il a décrit comme une immense vague de migrants illégaux qui va déferler sur le continent européen.
Des «centres d’accueil» en Tunisie et en Egypte
Le ministre autrichien des Affaires étrangères avertit qu’une nouvelle vague de migrants – désormais incapables d’emprunter l’itinéraire occidental des Balkans, à présent que cette voie a été effectivement fermée et que moins de migrants passent par la Turquie – a de plus en plus recours à la périlleuse route méditerranéenne.
M. Kurz exige que les réfugiés secourus en Méditerranée soient systématiquement dirigés vers des «centres d’accueil» en Tunisie et en Egypte, expliquant que si «une contrepartie attractive» est offerte à ces deux pays, ces derniers pourront facilement accepter ce marché.
Or, les deux pays concernés se sont déjà prononcés sur ce type de deal: la Tunisie a clairement rejeté cette idée, notamment par la voix de son chef du gouvernement Youssef Chahed, lors de sa récente visite à Berlin; et l’Egypte a exprimé un certain scepticisme à l’égard de ce plan ou de quelques autres propositions semblables faites par plusieurs parties européennes.
Cette nouvelle posture de Vienne intervient à un moment où la Commission européenne a lancé une procédure judiciaire à l’encontre de la République tchèque, la Hongrie et la Pologne, qui ont toutes trois refusé de souscrire à un plan obligatoire de réinstallation de migrants destiné à alléger la pression subie par l’Italie et la Grèce, deux pays qui ont été les plus mis à l’épreuve sous la pression constante des flux migratoires traversant la Méditerranée.
13.000 migrants sont morts noyés en 6 ans
L’été est là et les conditions climatiques sont favorables pour les dizaines, les centaines de milliers de migrants prêts à risquer leurs vies pour atteindre, à n’importe quel prix, les rives européennes de la Méditerranée. Depuis le début de l’année, plus de 160.000 d’entre ces preneurs de risque ont réussi à le faire.
Et cela a été le cas depuis de nombreuses années. Selon les chiffres de l’UE, entre 2011 et 2016, quelque 630.000 migrants illégaux et réfugiés ont atteint l’Italie en empruntant la voie de la Méditerranée centrale. Certains ont pu passer à travers les mailles du contrôle côtier italien, alors d’autres ont été sauvés par la sécurité frontalière italienne et débarqués en Italie.
L’on estime aussi que, durant ces six années, plus de 13.000 migrants sont morts noyés lors cette traversée, et beaucoup plus encore ont péri durant leur voyage à travers le Sahara… avant même d’atteindre la Méditerranée.
Bref, chaque année, il en sera ainsi pour ces morts par milliers. Il en sera toujours ainsi, également, pour cette peur du Vieux continent de se voir envahi par l’immigration clandestine. Tant que le nord continuera de percevoir et de concevoir son développement et son progrès indépendamment de ceux des pays du sud. La vie de l’un et la survie de l’autre sont indissociables…
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