Abdelaziz Barrouhi tel que je l’ai connu

Notre confrère Abdelaziz Barrouhi nous a quittés, dimanche 21 juillet 2024, aussi discrètement qu’il a vécu, sans bruit. Pour l’avoir longtemps côtoyé, j’éprouve un immense regret pour n’avoir pas appris sa mort à temps pour assister à ses obsèques.

Ridha Kefi       

Le défunt était journaliste à l’agence TAP avant de rejoindre l’agence Reuters en tant que correspondant à Tunis, puis directeur de son bureau en Tunisie. Mais c’est dans les bureaux de l’hebdomadaire Jeune Afrique, à Tunis et à Paris, où j’ai travaillé moi-même comme rédacteur en chef délégué entre 1994 et 2006, que j’ai appris à mieux le connaître et à apprécier ses qualités humaines et professionnelles.

Abdelaziz Barrouhi était plus âgé que moi et, bien sûr, plus expérimenté, et j’ai beaucoup appris auprès de lui. Son humilité, sa bonhomie et sa grande discrétion facilitaient beaucoup ses contacts avec ses collègues, même si la réserve et la distance qu’il affichait étaient souvent assimilées à de l’indifférence voire de la froideur.

En fait, l’homme était très affable et même parfois chaleureux et cordial quand on l’approchait sans préjugé ni parti-pris. Il avait une sorte de timidité qui ne l’empêchait pas de briser la glace par l’humour, souvent sarcastique. Je revois encore ce sourire qui éclairait son visage et exprimait, chez lui, comme une demande d’amitié qu’il ne donnait pas facilement.

Je mentirais si je disais que nos relations n’ont pas connu de nuages, et les nuages, aucune rédaction au monde n’en est exempte, mais nous avons toujours gardé une distance de respect qui n’interdisait pas un chouia de franchise et de sincérité. C’est ainsi qu’il m’est arrivé d’être critiqué par lui et de le critiquer moi-même parfois pour une position mal exprimée ou un mot qui n’était pas à sa place. Mais, à la fin, on se comprenait et on se pardonnait, car, dans ces années 1990-2000, nous étions, comme tous nos confrères de l’époque, soumis aux pressions pas toujours amicales et parfois même aux sautes d’humeur des régimes autoritaires en place dans les pays que nous couvrions pour le magazine, la Tunisie bien sûr, mais aussi les pays du Madhreb et du Machreq. Mais, au final, je garde de Si Abdelaziz le souvenir d’un grand frère auprès de qui on trouvait le réconfort quand on se sentait mal, et qui n’hésitait pas, malgré sa réserve naturelle, de vous ouvrir lui aussi son cœur.

La dernière fois où j’ai rencontré Abdelaziz, c’était aux obsèques de son frère aîné, en 2008 je crois. Il y avait du monde et on n’a pas pu vraiment parler ni évoquer nos souvenirs communs. Je regrette aujourd’hui de n’avoir pas essayé de le revoir depuis. Et je mesure ce que j’ai perdu toutes ces années où nous ne nous sommes pas vus.  

Nous ne faisons tous que passer. Nos traces respectives parleront de nous.

Repose en paix cher ami, et à bientôt.