Alors que le Moyen-Orient retient son souffle avec l’escalade causée par Israël suite aux assassinats ciblés de Fouad Shukr, dirigeant militaire du Hezbollah, et Ismaïl Haniyeh, chef du bureau politique du Hamas, avec un risque d’embrasement régional, Tel Aviv compte sur son système de défense antiaérienne pour se protéger. Un système se composant de plusieurs niveaux et connu pour être l’un des plus sophistiqués et des plus performants mais qui présente des failles. Déjà, l’opération Déluge d’Al-Aqsa le 7 octobre 2023 a prouvé qu’il n’était pas impénétrable, que dire alors s’il s’agit de l’Iran, puissance régionale, ou le Hezbollah, dix fois plus puissant que le Hamas? (Illustration: Le système antimissile israélien a été mis à l’épreuve lorsque l’Iran a lancé des drones et des missiles vers Israël en avril. Ph. Amir Cohen/Reuters)
Imed Bahri
Le Wall Street Journal américain a annoncé qu’Israël a étendu son système de défense antiaérienne en prévision d’une éventuelle attaque sur plusieurs fronts de l’Iran et de ses alliés ce qui pourrait constituer le plus grand test jusqu’à présent d’un système de défense à plusieurs niveaux et qu’il lui faut désormais bien plus que le système Iron Dome (Dôme de Fer) dont il se vante.
Le journal a expliqué dans un article d’Anat Peled que le Dôme de Fer développé par les États-Unis et Israël au cours de la dernière décennie est devenu le système leader mondial pour abattre des missiles à courte portée réduisant ainsi la menace posée par les armes lancées par des groupes palestiniens cependant les capacités de l’Iran et du Hezbollah au Liban constituent un autre problème.
Du fait que l’Iran possède des drones et des missiles balistiques que le Dôme de Fer n’a pas été conçu pour arrêter et parce que le Hezbollah dispose d’un arsenal comprenant des dizaines de milliers de projectiles divers, Israël et les États-Unis ont façonné un système de défense aérienne plus vaste qui s’appuie sur les capacités de leurs forces aériennes et au-delà ainsi que sur les systèmes radar des pays voisins même des pays arabes qui étaient autrefois des ennemis jurés d’Israël.
Coordination israélienne avec les pays arabes
«C’est un système complet et synchronisé qui fonctionne comme une montre», a déclaré Yehoshua Kalisky, chercheur à l’Institut d’études sur la sécurité nationale de Tel Aviv, ajoutant qu’il pensait qu’Israël était relativement bien préparé à une attaque majeure.
L’auteur a souligné que le commandement des opérations militaires américaines au Moyen-Orient coordonnera de nombreuses opérations après qu’Israël ait été introduit dans la zone géographique de ce commandement en 2021 lui permettant une plus grande capacité de coordination avec les pays arabes avec lesquels il n’a pas de relations.
Le journal rapporte que ce système a été testé en avril lorsqu’Israël avec l’aide des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et d’autres a réussi à abattre plus de 300 missiles iraniens avec un taux d’interception de 99% et avec ça l’Iran avait déclaré qu’il avait réussi à détruire des cibles militaires majeures de l’armée israélienne et qu’il était efficace pour démontrer sa capacité à pénétrer les systèmes de défense israéliens.
Submerger les systèmes de défense israéliens
Cette fois, les responsables américains sont plus inquiets car l’attaque iranienne pourrait s’accompagner de frappes simultanées du Hezbollah et d’autres alliés de Téhéran dans la région pour submerger les systèmes de défense israéliens en réponse à l’assassinat de Fouad Shukr, haut dirigeant du Hezbollah, ainsi que de le chef du Mouvement de la résistance islamique (Hamas) Ismaïl Haniyeh à Téhéran.
Le journal a affirme que l’une des difficultés attendues face à une importante salves de missiles sur plusieurs fronts est la nécessité de classer rapidement les différentes cibles et de déterminer celles qui doivent être abattues notant que le système de défense antiaérienne israélien à plusieurs niveaux est conçu pour une telle situation car il se compose de plusieurs parties destinées à contrer différents types de menaces.
David’s Sling (la Fronde de David) est l’un des systèmes les plus récents et couvre les missiles et les drones à longue et courte portée. Quant à Arrow 3, il est considéré comme le joyau du système. Il intercepte les missiles balistiques à longue portée qui sortent de l’atmosphère et sa version antérieure est toujours utilisée pour repousser les missiles à moyenne et longue portée.
Cependant, selon le WSJ, les drones sont considérés comme l’un des points faibles de la défense antiaérienne israélienne en raison de leur capacité à voler à basse altitude et à échapper aux systèmes radar. Le meilleur exemple en est le drone lancé par les Houthis depuis le Yémen qui n’a pas été détecté et qui a frappé le cœur de Tel Aviv par surprise en juillet.
En plus de ce qui précède, Israël a développé un nouveau système appelé Iron Beam qui utilise le laser pour intercepter et détruire les projectiles. Les experts en sécurité estiment qu’il pourrait être efficace pour lutter contre les drones mais jusqu’à présent, il demeure inutilisable. Certains responsables pensent qu’il pourrait être prêt d’ici 2025.
Alors que l’Iran et le Hezbollah menacent Israël de représailles sévères et que les Israéliens se préparent à rester dans des abris pendant une longue période, Tal Inbar, un analyste de l’Alliance de défense antimissile aux États-Unis, a déclaré que «l’attaque précédente a brisé une barrière psychologique en Iran», ajoutant qu’Israël et l’Iran en ont tiré des leçons.
Israël, sait selon le WSJ, que l’une des raisons pour lesquelles il a réussi à repousser l’attaque d’avril est qu’il dépend d’autres pays pour une défense aérienne optimale et qu’il a bénéficié plusieurs heures d’avertissement qu’il ne recevra peut-être pas cette fois-ci si l’Iran le souhaite pour maximiser les dégâts.
Si le système de défense antiaérienne d’Israël présente des failles en l’occurrence qu’il n’est pas impénétrable, qu’il ne peut pas détecter les drones kamikazes et qu’Israël n’est pas autonome dans ce domaine, la défense antiaérienne demeure le talon d’Achille de l’Iran qui en est conscient.
Le New York Times a cité cette semaine des responsables iraniens affirmant que Téhéran avait demandé à la Russie des systèmes de défense antiaérienne avancés en vue d’une éventuelle guerre avec Israël. Les responsables ont déclaré que la Russie avait déjà commencé à livrer à l’Iran des équipements avancés de radar et de défense antiaérienne.
L’importance accordée aux systèmes de défense antiaérienne et leur place centrale dans les stratégies militaires dans les cas d’Israël, de l’Iran ou de n’importe quel pays démontre qu’un État aussi riche économiquement et aussi puissant soit-il militairement reste vulnérable et tout ce qu’il a construit pendant des décennies voire des siècles peut tomber comme un château de cartes s’il n’est pas protégé par un système de défense antiaérienne solide et efficace.