La pandémie du coronavirus (Covid-19), qui menace l’humanité tout entière, a bouleversé la vie en société et induit de nouveaux comportements, inspirés surtout par la peur et la méfiance.
Par Jamila Ben Mustapha *
Ce «connard» de coronavirus est vraiment contre l’amour du prochain et la charité à laquelle nous ont poussés toutes les religions. Il remet en cause la définition aristotélicienne de l’homme comme «animal social» : pour obliger chacun à éviter le contact physique rudimentaire avec l’autre tel qu’il s’exprime dans le salut, il a fait mille fois mieux que le christianisme avec sa considération de la chair – et non de l’accolade – comme péché, et l’islamisme qui n’interdit pas non plus le salut tactile et les embrassades entre personnes du même sexe.
On ne peut mieux nous pousser à l’individualisme et, pire, à la méfiance vis-à-vis de l’autre : il suffit de laisser échapper un éternuement irrépressible à un mètre de son prochain en faisant la queue ces temps-ci, pour se voir foudroyé par les regards indignés de celui-ci et étouffer un fou-rire indiscipliné.
Bien entendu, ce coronavirus a aussi des bienfaits inattendus : la pause spatiale contrainte et forcée et le renoncement à courir à droite et à gauche; en conséquence, la perception à distance de cette agitation comme souvent vaine; la diminution de la pollution dans les rues de la capitale, qui nous permet de mieux respirer; enfin, la création de conditions pour le recueillement et la réflexion et, notamment, la remise en question on ne peut plus concrète, preuve actuelle à l’appui, de la globalisation et de l’exploitation féroce et à outrance de la planète par les pays industrialisés.
Bref et en conclusion : une arme à double tranchant comme tout le reste, la mortalité grandissante rendant toutefois écrasante sa négativité par rapport à ses aspects positifs.
* Universitaire et écrivain.
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