Autant le confinement général pour faire barrage à la propagation de la pandémie du coronavirus (Covid-19) était facile à mettre en place, en fermant tout ce qui n’était pas vital, autant le confinement ciblé, ou déconfinement progressif, annoncé il y a deux jours par le gouvernement tunisien et devant commencer lundi prochain, 4 mai 2020, sera dur à faire respecter et s’apparente à un coup de poker.
Par Pr Faouzi Addad *
Une levée trop rapide du confinement général pourrait, en effet, être à l’origine d’une seconde vague de contaminations aux conséquences imprévisibles. D’autant plus que les études réalisées dans les pays ayant réalisé des tests massifs montrent que très peu de patients ont développé une immunité, soit 6 à 10% de la population. On est donc très loin du taux théorique nécessaire à la réalisation d’une «immunité collective», à savoir 70%.
En l‘absence de vaccin, cette immunité sera impossible à obtenir. Ce qui signifie que le virus continuera à circuler parmi nous.
Une grande partie de la population reste exposée
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a reconnu que le nombre de personnes contaminées est bien plus faible que ce qui était initialement prévu. Donc une grande proportion de la population reste exposée et le virus peut à nouveau se propager.
Ceci est vraiment le cas de notre pays où, selon les estimations, 25.000 personnes ont été épargnées lors de la première vague et qui pourraient être touchées. De plus, 3 exigences essentielles manquent pour un déconfinement sécurisé : les tests massifs pour détecter, isoler et traiter rapidement les nouveaux cas; les masques distribués à toute la population; et, enfin, une conscience sans faille des citoyens du nécessaire respect des mesures barrières.
Cependant, et même si ces 3 exigences ne sont pas encore assurées en Tunisie, loin s’en faut, je reste optimiste, car j’estime que le déconfinement a déjà été réalisé sur le terrain avant même son annonce officielle, devant les bureaux de postes, il y a 3 semaines, et tous les jours, dans les souks, depuis le début de ramadan, mais cela n’a pas eu de conséquences graves et ne s’est pas accompagné (ou pas encore ?) d’un redressement de la courbe des contaminations.
Il faut garder les cafés, les restaurants, les mosquées fermés
Ce n’est pas une raison pour lâcher prise. Aussi faudra-t-il rester vigilant dans les transports publics, qui vont reprendre à partir du 4 mai, et garder les cafés, les restaurants, les mosquées et tous les lieux de rassemblement fermés pendant une période plus longue, tout en sanctionnant tous les écarts, et notamment le non-respect des mesures barrières.
Cette fois, la France sera attentive à ce qui se passera dans notre pays, puisqu’elle engagera son processus de déconfinement une semaine plus tard. Un défi de plus pour notre système de santé avec le retour des consultations des patients non-Covid. Le reste du mois de ramadan s’annonce chaud et décisif pour l’avenir de la guerre contre la pandémie du coronavirus.
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