Le gouvernement d’union nationale (GUN) en Libye, dirigé par Fayez Sarraj, a annoncé vendredi 28 août 2020 dans un communiqué la suspension du ministre de l’Intérieur, Fathi Bashagha, alors qu’il était en visite de travail à Ankara chez le parrain turc, et ce à titre «provisoire» afin de mener une enquête administrative suite à la répression des manifestations qui secouent Tripoli depuis le dimanche 23 août 2020.
Par Imed Bahri
M. Bashaga a rejeté toute responsabilité dans la répression subie par les manifestants et a accusé des groupes armés non identifiés d’avoir enlevé et séquestré des manifestants qu’il a qualifiés lui-même de pacifiques.
Les manifestations qui secouent la capitale libyenne sont l’expression d’un ras le bol des citoyens excédés par la corruption, les coupures d’eau et d’électricité, qui plus est en pleine canicule estivale, et l’insécurité.
Les observateurs estiment que cette suspension intervient dans un contexte de rivalité croissante entre le chef du gouvernement et son ministre de l’Intérieur. Sarraj, appuyé par les milices de Tripoli est de plus en plus contesté et Bashagha (un nom dont la consonance souligne une origine turque), qui est soutenu par Ankara et les milices de Misrata, aurait l’ambition de prendre la tête du gouvernement de Tripoli.
Sarraj a donc profité des événements pour se débarrasser de cet encombrant rival qu’est son ministre de l’Intérieur. D’ailleurs, les manifestations n’ont pas tardé à sortir à Misrata, cité portuaire et commerçante dont est originaire Bashagha.
M. Bashaga a affirmé respecter la démocratie et l’État civil, qu’il se faisait un devoir de respecter la décision du gouvernement et qu’il était tout à fait disposé à se soumettre à l’enquête, tout en appelant à ce que son audition soit retransmise publiquement par les médias. Il sent sans doute derrière cette décision une manœuvre visant à lui préparer un dossier d’accusation pour le mettre sur la touche, sinon en prison, afin que Sarraj garde entre ses mains l’entièreté du pouvoir en Tripolitaine.
Le sous-secrétaire au ministère de l’Intérieur, Khaled Tijani Mazen, a été chargé d’assurer l’intérim.
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