Dans ce post Facebook, l’auteure déplore les campagnes de dénigrement qui visent les femmes diplomates, victimes, selon elle, de misogynie ordinaire, de méchanceté gratuite et de jalousie.
Par Sémia Zouari *
La misogynie ordinaire a encore frappé les femmes Chefs de poste ! Triste de constater qu’elles ont bon dos, nos femmes diplomates de carrière et au moindre supposé faux pas, la machine de la calomnie se met en branle.
Ainsi, il a suffi que la capuche de son burnous ait glissée lorsqu’elle s’est inclinée pour recevoir ses lettres de créances des mains du Président de la République, pour susciter une avalanches de critiques à l’encontre de notre collègue Mme Fatma Omrani Chargui
Suffisant pour susciter tout ce buzz, sachant que cette campagne de dénigrement cible injustement l’une de nos meilleures diplomates et que le MAE est plein de compétences féminines prêtes à illuminer notre diplomatie pour peu que l’égalité des chances et la parité soient respectées.
Autres cibles de la misogynie actuelle de notre société et de nos médias : deux femmes Consules, diplomates de carrière, tout aussi intègres et compétentes que Mme Omrani. Mme Beya Abdelbaki, Consule de Tunisie à Naples, est stigmatisée par un titre accusateur et mensonger du quotidien Al-Chourouk alors même que le responsable interviewé précise bien qu’elle n’a fait que répercuter un courrier transmissif des doléances de l’opérateur économique impliqué dans l’affaire des déchets toxiques importés d’Italie vers Sousse, via une vaste filière mafieuse jusque-là peu importunée.
Autre victime de ce harcèlement misogyne, notre Consule à Grenoble, Mme Soumaya Zorai, épinglée, en toute illégitimité par le député Nasfi, pour n’avoir pas pu participer, en présentiel, à la réunion interservices organisée par notre Ambassadeur en France.
M. Nasfi s’est auto-proclamé évaluateur de nos activités consulaires, à l’heure où la pandémie du Covid inflige à nos missions diplomatiques et consulaires des restrictions sanitaires incontournables imposées par les pays d’accréditation, en toute souveraineté.
Sans prétendre que nos femmes diplomates doivent être exonérées de toute critique, il faudrait que le MAE prenne les devants pour défendre les hauts fonctionnaires, hommes ou femmes, des lynchages sur la place publique, surtout lorsque ces cadres ont des états de service sur des décennies de bons et loyaux services.
Certes, le MAE est appelé à engager une vaste réflexion sur la nécessaire restructuration et digitalisation des modalités de fonctionnement de ses missions à l’étranger, paralysées par des budgets sans cesse réduits et figées par des lois de cadres obsolètes où plusieurs emplois locaux n’ont plus de raison d’être avec les ouvertures des NTIC… Mais au-delà de ces restructurations nécessaires et légitimes, il faudrait veiller à ne pas laisser se reproduire le lynchage des femmes Chefs de poste, qui avaient été déjà injustement persécutées du triste temps de la Troïka.
Car que faut-il voir derrière ces campagnes perfides si ce n’est de la misogynie ordinaire, de la méchanceté et aussi malheureusement l’inévitable jalousie vis à vis des compétences féminines.
A tous ceux et celles qui ont accablé injustement de respectables Grands Commis de l’État, sachez qu’un jour, vous verrez une femme Ambassadeur voilée recevoir ses lettres de créances. Elle fera partie de nos diplomates de carrière et sera représentative d’une partie de notre société.
Qu’allez vous faire ? La lyncher ? Ouvrez vos esprits et hissez le débat s’il vous plaît…. Le monde change chaque jour et chacun a droit à la liberté et à la dignité.
Être moderniste c’est adhérer aux valeurs universelles des Droits de l’Homme telles que définies par les Nations Unies, hors des polémiques stériles et des intégrismes, qu’ils soient religieux ou anticléricaux, car il n’y a pas que les islamistes qui soient capables d’obscurantisme, certains « modernistes » en font souvent tout autant.
* Diplomate.
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