Au terme de deux ans d’un pouvoir devenu aujourd’hui absolu, Kaïs Saïed n’a rien fait de concret pour tenter de redresser la situation en Tunisie, se contentant de monter les citoyens les uns contre les autres, d’ajouter l’instabilité à l’incertitude, et d’alimenter une atmosphère de guerre civile, qui n’est pas seulement dans les esprits.
Par Imed Bahri
Le président Kaïs Saïed, dont les connaissances en économie sont plus sommaires que celles des citoyens tunisiens lambdas en énergie nucléaire, nous avait gratifié récemment d’une trouvaille sous forme d’un jeu de mot : au lieu de parler de PIB (produit intérieur brut), parlons plutôt de bonheur national brut (BNB).
On croit rêver, quand on sait la situation catastrophique de l’économie tunisienne : croissance en panne, chômage galopant, baisse du pouvoir d’achat, hausse de la pauvreté, appauvrissement de la classe moyenne…
Une «loi de souffrances» 2022
Comme pour joindre l’acte à la parole, le président de la république, qui accapare aujourd’hui tous les pouvoirs, nous a carrément imposé sans discussion d’aucune sorte, pour choyer notre BNB, une loi de finances 2022, une «loi de souffrances» plutôt, dont les deux principales caractéristiques sont la hausse d’impôt et l’austérité tout azimut. De quoi déprimer davantage les citoyens et désespérer les rares entreprises qui ont réussi jusque-là à résister à la crise en comptant sur leurs propres moyens et à ne pas mettre la clé sous le paillasson.
Est-ce pour pointer l’absurdité et l’insignifiance du discours du président, dont le populisme n’a d’égal que l’autosuffisance intellectuelle portée par une ignorance crasse des réalités économiques, qu’un dernier rapport international est venu confirmer l’atmosphère de morosité et le sentiment d’abattement qui règnent aujourd’hui dans notre pays.
La Tunisie a en effet été classée, en 2021, au 136e rang sur 165 pays dans l’indice mondial du bonheur, derrière la Palestine et pas très loin des pays ayant les plus faibles indices du bien-être comme sont l’Afghanistan, le Soudan du Sud, le Zimbabwe, le Rwanda, la Syrie, la Centrafrique, et la Tanzanie.
Ce classement a été publié par le World Happiness Report ou Rapport mondial du bonheur, publié par le Réseau de solutions pour le développement durable des Nations unies (United Nations Sustainable Development Solutions Network), qui mesure le bonheur des citoyennes et des citoyens au sein des États en recourant à plusieurs indicateurs dont notamment le PIB par habitant, l’aide sociale (logement, allocations…), l’espérance de vie en bonne santé, la liberté relative aux choix de vie, la générosité, et la perception de la corruption gouvernementale.
En attendant une main… charitable
Kaïs Saïed n’est peut-être pas responsable de la situation catastrophique où se morfond aujourd’hui la Tunisie et qui est la conséquence d’une décennie de mauvaise gouvernance, mais on peut tout de même lui reprocher qu’au terme de deux ans d’un pouvoir devenu aujourd’hui absolu, il n’a rien fait de concret pour tenter de redresser la situation, se contentant de monter les Tunisiens les uns contre les autres, d’ajouter l’instabilité à l’incertitude, et d’alimenter une atmosphère de guerre civile, qui n’est pas seulement dans les esprits.
Sur le plan diplomatique, le bilan du locataire du palais de Carthage est carrément nul, puisque la Tunisie, sous sa conduite, n’inspire plus confiance, si elle n’inquiète pas ses partenaires historiques, comme les Etats-Unis, l’Union européenne ou les pays arabes, qui ne comprennent vraiment pas comment ce pays hier encore bien tenu voire considéré comme pré-émergent est-il en train de perdre totalement pied et la plupart hésitent désormais à lui tendre une main… charitable.
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