La sous-secrétaire à la sécurité civile, la démocratie et aux droits de l’homme, Uzra Zeya, se rendra le 23 mars 2022 à Tunis, annonce le bureau du porte-parole du département d’Etat des Etats-Unis dans une note aux médias, publiée le 21 mars. Visite qui exprime l’inquiétude et les réserves de Washington quant aux évolutions de la situation politique en Tunisie et à l’obstination du président Kaïs Saïed à aller jusqu’au bout de son projet politique personnel, au mépris des règles démocratiques.
Par Imed Bahri
«La sous-secrétaire Zeya rencontrera de hauts responsables du gouvernement pour discuter de réformes politiques et économiques, de la protection des droits de l’homme et du rôle essentiel que joue la société civile dans une démocratie forte». Et d’ajouter: «Au cours de ses entretiens, la sous-secrétaire abordera également les questions bilatérales et régionales et les défis économiques auxquels la Tunisie est confrontée à la suite de l’agression russe contre son voisin.»
La transition démocratique au frigo
Par ailleurs, «la sous-secrétaire Zeya rencontrera également des défenseurs des droits de l’homme, des dirigeants syndicaux et d’autres représentants de la société civile tunisienne pour entendre leurs points de vue sur les défis et les opportunités auxquels la Tunisie est confrontée», souligne encore la note, comme pour souligner la tonalité éminemment politique de la visite et les réserves de Washington vis-à-vis de la politique suivie par Kaïs Saïed qui, depuis son coup (d’Etat ou d’éclat ?) du 25 juillet dernier, a mis la transition démocratique en Tunisie entre guillemet ou au frigo pour être plus précis, pour accaparer tous les pouvoirs (exécutif, législatif et, depuis peu aussi, judiciaire), marginaliser les partis et les organisations de la société civile et revendiquer un tête-à-tête avec le «peuple [qui] veut», le fameux slogan populiste dont il enrobe toutes ses décisions.
On remarquera que la note du Département d’Etat insiste sur la protection des droits de l’homme, le rôle essentiel que joue la société civile et les réformes démocratiques, tout en les reliant aux défis économiques auxquels la Tunisie est confrontée, sachant que notre pays, qui sollicite un nouveau prêt du Fonds monétaire international (FMI) pour boucler son budget pour 2022 et relancer son économie en berne, a besoin du soutien des Etats-Unis, membre très influent au sein du FMI, pour obtenir l’accord du conseil d’administration de l’institution financière internationale pour le prêt sollicité.
La dangereuse fuite en avant du président Saïed
Le fait que la visite de la responsable états-unisienne intervient quelques jours avant l’arrivée à Tunis des négociateurs du FMI est un signe fort du lien que les partenaires occidentaux mettent entre la reprise du processus démocratique en Tunisie, mis à mal par le messianisme du président Saïed, et l’aide financière internationale à notre pays.
La question est de savoir si, dans son obstination à aller jusqu’au bout de son projet politique personnel, à la fois vague, incompris et très contesté, Kaïs Saïed va poursuivre sa fuite en avant dans une course solitaire dont la seule conséquence, dans l’immédiat, sera, à n’en point douter, davantage d’isolement de la Tunisie sur le plan international, un isolement qui, du reste, pourrait aggraver sa situation économique déjà désastreuse.
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