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Rachat de GO Malte par Tunisie Telecom : Une vraie opportunité à saisir

Nizar-Bouguila-TT

Si Tunisie Telecom, aujourd’hui en quête d’une économie d’échelle, a décidé de racheter GO Malte, c’est parce qu’elle a beaucoup à y gagner.

Par Zohra Abid 

C’est, en tout cas, le point de vue défendu par Nizar Bouguila, Pdg de l’opérateur historique tunisien, lors d’une rencontre avec des représentants de médias, au siège de son entreprise, aux Berges du Lac de Tunis.

M. Bouguila a apporté les éclaircissements nécessaires pour dissiper les fausses allégations de certaines parties qui ont alimenté une polémique autour de cette opération dans le but de semer la confusion dans l’esprit des citoyens et des responsables politiques.

Retour sur une polémique sans réel objet

Depuis l’annonce, le 23 mai dernier, de la sélection de Tunisie Telecom en tant que candidat pour l’acquisition des actions de la société GO Malte, les attaques ont fusé à travers certains médias, qui sont allés jusqu’à parler de conflit d’intérêt, en se basant sur le fait que le groupe Emirates International Telecommunications (EIT), qui détient 35% du capital de TT, possède aussi 60.786.292 actions représentant 60% du capital émis de la société GO, proposés à la cession.

Autre argument avancé pour alimenter le doute sur l’utilité de cette opération: par cette acquisition, TT, qui est détenu à hauteur de 65% par l’Etat tunisien, risque d’aggraver l’endettement extérieur de l’Etat.

Suite à cette polémique, certains députés ont demandé l’audition de Noomane Fehri, ministre des Technologies de l’information et de l’Economie numérique, pour l’interroger sur les dessous de cette opération, les bénéfices que l’on peut en attendre ou les pertes qu’elle pourrait causer.

Pour dissiper les malentendus et expliquer les raisons qui les ont poussés à présenter la candidature de TT pour le rachat d’une partie du capital de GO, les responsables de l’entreprise sont sortis de leur réserve et ont donné les explications nécessaires sur cette opération qu’ils considèrent comme un investissement porteur, pour TT mais aussi pour la Tunisie, car GO, qui est cotée à la Bourse de Malte, se porte comme un charme et son avenir est garanti.

Les griefs exprimés contre cette opération méritent d’être décortiqués et discutés, d’autant qu’ils se caractérisent par l’imprécision et le flou, a estimé Sonia Logani, directrice de la communication de Tunisie Telecom. «C’est bien d’être vigilant, mais il convient d’être également précis et de ne pas induire l’opinion publique en erreur», a-t-elle ajouté.

Nizar Bouguila, qui ne veut pas connaître les motivations des parties ayant alimenté cette polémique, estime que l’opération est menée par des experts financiers, dans le strict respect des lois en vigueur et des intérêts de TT. «Il n’a jamais été question de faire appel à la garantie de l’Etat, comme propagé par certains», a-t-il assuré.

«J’ignore les dessous de cette campagne, mais je tiens à vous dire que je suis très fier de cette opération. TT, qui est une entreprise publique, a travaillé, dès le début de cette opération, en étroite collaboration avec les instances gouvernementales compétentes. Plusieurs réunions ont eu lieu entre la direction générale de TT, des représentants du ministère des Finances et de la direction générale de la privatisation auprès de la présidence de gouvernement. Nous avons pris en compte les recommandations de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sur le financement de l’opération lors des négociations avec les bailleurs des fonds», a précisé Nizar Bouguila, ajoutant que EIT, partenaire minoritaire de TT, n’a assisté à aucune de ces réunions.

GO, intéressant car florissant

«Suite au lancement par GO, le 8 janvier dernier, d’un appel international à manifestation d’intérêt pour la cession des parts de son capital, plusieurs réunions ont eu lieu pour discuter des avantages et inconvénients d’une telle opération et la décision finale est passée par différentes phases, jusqu’à avril dernier, lorsque la Commission de restructuration des entreprises publiques (Carep) a donné un avis favorable», a encore expliqué le Pdg de TT.

«Afin d’éviter tout conflit d’intérêt, TT a veillé à la stricte application de l’article 200 du code des sociétés commerciales. Toutes les décisions (participation, engagement des frais…) ont été autorisées par le conseil d’administration de TT, auditées par ses commissaires aux comptes, qui ont présenté un rapport spécial sur l’opération qu’ils ont approuvée à l’assemblée générale», a précisé, de son côté, Fakher Ben Hnid, directeur exécutif de l’audit interne au sein de TT, qui a pris part à toutes les réunions et les négociations et suivi l’opération depuis le début.

«On nous a soumis plus de 113.000 documents en anglais. Notre travail, que ce soit sur le plan technique ou financier, était minutieux. Nous avons avancé point par point», a enchaîné Sofiane Antar, un autre directeur exécutif à TT.

«Je remercie les compétences de TT qui ont mené cette opération internationale jusqu’à son aboutissement et avec toute l’efficacité requise. Je suis fier de l’énergie de cette équipe, désormais capable de gérer des dossiers internationaux de grande complexité», a lancé le Pdg de TT.

Pour lui, «l’acquisition de 66% du capital de GO ne peut qu’apporter de la valeur ajoutée à Tunisie Telecom, qui doit s’ouvrir à l’international et avoir un pied à terre en Europe, sachant que Malte est membre de l’Union européenne et que Go détient deux filiales, Forthnet en Grèce et Cablenet à Chypre, deux autres pays européens».

Go Malte, créée en 1995, emploie 850 agents et dispose d’un grand savoir-faire qui apportera un plus à TT. «L’opérateur maltais est de loin le leader de son marché avec 66% de parts sur le fixe et 39% sur le mobile. Le revenu mensuel moyen d’un abonné à Malte Go est 5 fois plus important que celui d’un abonné tunisien», a tenu aussi à préciser M. Bouguila, ajoutant que l’activité cloud de Malte Go représente déjà 10% de son chiffre d’affaires et que l’opérateur possède 2 câbles sous-marins, un réseau 4G, un réseau fixe, un réseau internet… «Bref, c’est un opérateur intéressant car florissant», a conclu M. Bouguila.

Vers une économie d’échelle

Certes, Malte est un petit pays, une île au large de la Tunisie et au cœur de la Méditerranée, mais il ne faut pas perdre de vue que le revenu moyen d’un Maltais est 5 fois plus élevé que celui d’un Tunisien et que 1,4 millions de touristes ont visité ce pays l’an dernier, soit 3 fois plus le nombre d’habitants. On imagine donc le potentiel du marché des télécoms dans un pays en pleine expansion économique.

Par ailleurs, le groupe GO est très introduit dans le marché européen et la stratégie de TT est de se projeter dans une économie d’échelle. «Nous avions eu des tentatives en ce sens. La première en Mauritanie, qui rencontre des difficultés pour des raisons politiques. Nous sommes cette fois sur un marché porteur, qui va nous permettre de faire de la croissance, tout en restant dans notre environnement immédiat», a insisté M. Bouguila, ajoutant que de pareilles opportunités ne se présentent pas tous les jours. Traduire: TT ne pouvait rater une pareille opération qui s’inscrit au cœur de sa stratégie globale.

«Pour développer cette économie d’échelle, nous devons avoir un pied en Europe et accéder à un marché qui nous permettra de mieux vendre notre plateforme. Grâce à cette acquisition, la marge du groupe augmentera de 32%. Puis c’est un investissement en euros. Il s’agit donc d’un actif protégé, sachant que le droit d’affaires maltais s’inspire de celui de la Grande Bretagne, qui est l’un des plus stricts au monde», a encore plaidé Nizar Bouguila, qui est convaincu que l’entrée de TT dans le capital de GO est une «opération rentable, protégée et sans risque».

Une manière de faire face à la concurrence

Si TT cherche à sortir à l’international, et il ne faut pas être grand clerc pour le comprendre, c’est parce que le marché tunisien, où la concurrence est en en train de casser les prix, est devenu trop étriqué pour un groupe de son poids.

«TT doit investir en infrastructure et optimiser ses coûts pour pouvoir tenir dans un secteur où l’économie d’échelle est très déterminante. Malte ayant des liens historiques forts avec la Libye, le rachat de Go pourrait constituer un tremplin pour une prochaine entrée dans le secteur des télécoms dans ce pays, dès que la situation y sera de nouveau rétablie. Malte n’est donc pas seulement une porte sur l’Europe, elle est aussi une porte sur la Libye», a encore souligné M. Bouguila, qui raisonne en manager soucieux de l’avenir de son entreprise.

Reste le financement de cette opération qui sera réalisé, à 100%, par des fonds extérieurs, et l’Etat tunisien ne déboursera pas un sou. En effet, «un emprunt sera réalisé avec le concours d’un consortium de banques internationales. Nous n’allons pas, dans cette opération, faire sortir des devises de Tunisie et les conditions de l’emprunt ont été examinées au préalable et validés par la BCT», a assuré le Pdg de TT.

En cas d’audition de Noomane Fehri par la commission des finances à l’Assemblée, la présence du Pdg de TT sera plus qu’utile pour dissiper les malentendus alimentés autour de cette vraie fausse affaire.

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