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L’Onu s’inquiète de l’activisme des jihadistes tunisiens

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Selon un récent rapport de l’Onu il y aurait 4.000 combattant tunisiens en Syrie, 1000 à 1500 en Libye, 200 en Irak, 60 au Mali et 50 au Yémen.

Le Groupe de travail des Nations Unies sur l’utilisation de mercenaires a averti, aujourd’hui, que des réseaux complexes de recrutement et de voyage ont enrôlé des milliers de tunisiens, hommes et femmes, ainsi que des familles entières, pour participer aux combats en Syrie et en Irak. La plupart des combattants auraient rejoint les groupes takfiri et d’autres groupes extrémistes à l’étranger.

«Le nombre de combattants étrangers tunisiens est l’un des plus élevés parmi ceux qui voyagent pour rejoindre les conflits à l’étranger tels qu’en Syrie et en Irak», a déclaré l’experte des droits de l’homme Elżbieta Karska, qui dirige actuellement le Groupe d’experts, après une visite officielle en Tunisie pour recueillir des informations sur les activités des combattants étrangers dans le pays.

Au cours de cette mission, l’experte a été informée de la présence de quelque 4.000 tunisiens en Syrie, 1000 à  1500 en Libye, 200 en Irak, 60 au Mali et 50 au Yémen. Les 625 qui sont rentrés d’Irak sont poursuivis en justice.

«Les réseaux de voyage sont complexes et œuvrent pour faire passer les recrues à travers les frontières poreuses, et parfois par des zones où la traite des personnes et la contrebande ne peuvent être contrôlées efficacement», a noté Mme Karska. «Les témoignages confirment que les routes prises comprennent le passage par la Libye vers la Turquie, puis vers la Syrie en passant par la frontière à Antakya», a-t-elle ajouté.

L’experte a également attiré l’attention sur les liens possibles entre les phénomènes de mercenariat et de combattants étrangers.

«Il nous a été rapporté que les recruteurs dans ces réseaux sont bien payés – un chiffre donné est de l’ordre de 3000 à 10.000 US$ par nouvelle recrue, selon les qualifications de la personne», a révélé Mme Karska. «Le rôle de l’argent varie donc apparemment selon le stade du recrutement et de l’activité du combattant étranger. Ceci est d’une importance particulière pour le Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires»,  a affirmé l’experte.

«On nous a raconté à plusieurs reprises que de nombreux combattants étrangers suivent un entrainement en Libye avant d’aller en Syrie et que l’instabilité en Libye a facilité de nombreuses activités de soutien expliquant la croissance du nombre de combattants étrangers, leur entrainement et leur voyage», a-t-elle dit. «La résolution du conflit et la solution politique en Libye seraient donc très favorables aux efforts antiterroristes de la Tunisie», note l’experte.

Parmi les facteurs de motivation qui expliquent le nombre élevé de combattants étrangers tunisiens, l’experte a souligné les idéologies religieuses et politiques, les gains financiers, les conditions économiques et sociales, le fait d’avoir un but et un sentiment d’appartenance.

La majorité des Tunisiens qui voyagent pour rejoindre des groupes extrémistes à l’étranger semblent être jeunes, souvent âgés de 18 à 35 ans. Certains de ces jeunes viennent de milieux socio-économiques défavorables, mais aussi de la classe moyenne et des classes les plus aisées de la société. «Nous avons également été informés que des professionnels offrent leurs compétences aux groupes extrémistes et que certains semblent avoir été attirés à tort par des récits de bravoure et d’exaltation», a déclaré la présidente du Groupe.

Mme Karska a noté que «selon les témoignages, les femmes qui représentent un petit nombre, ont peut-être également rejoint ces groupes pour des raisons similaires, ainsi que pour des raisons humanitaires ou personnelles afin de rejoindre leurs maris ou partenaires».

Le Groupe de travail a également été informé du phénomène croissant de familles entières qui se déplacent vers les zones de conflit.

«Un facteur, ou une combinaison de plusieurs d’entre eux, peuvent être pertinents, rendant ainsi les profils des combattants étrangers assez variés», a déclaré l’experte, exhortant le Gouvernement tunisien à adopter un plan stratégique national pour aborder la question d’une manière globale et stratégique plusieurs niveaux.

«Un plan stratégique national doit donc répondre à la diversité des profils et des méthodes de recrutement et avoir des effets immédiats, à moyen et long terme, tout en veillant à l’équilibre entre les mesures punitives et sociales et s’assurant de l’adoption des standards internationaux des droits de l’homme et de tous ses éléments», a déclaré l’experte.

Le Groupe de travail a salué les efforts des autorités tunisiennes qui envisagent des solutions alternatives aux solutions punitives pour les combattants rapatriés, y compris les approches sociales, culturelles et religieuses. À cet égard, les experts ont recommandé la nécessité de préserver un équilibre entre les mesures punitives et sociales, afin de trouver des réponses  à l’origine et aux causes structurelles du phénomène des combattants étrangers.

Au cours de la visite de huit jours, la délégation a tenu des réunions à Tunis et Monastir et a visité la prison de Mornaguia. Elle a également rencontré des représentants des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, des universitaires et des représentants d’organisations de la société civile, y compris des familles de personnes ayant rejoint des conflits à l’étranger. Des réunions ont également eu lieu avec des représentants des agences de l’ONU et d’autres partenaires internationaux.

Le Groupe d’experts présentera son premier rapport sur la question des combattants étrangers à l’Assemblée générale des Nations Unies plus tard cette année. Ce premier rapport comprendra des faits recueillis au cours de sa visite en Tunisie et dans d’autres pays, ainsi que des informations reçues des États membres des Nations Unies et d’autres acteurs.

Le Groupe de travail présentera un rapport complet sur sa visite en Tunisie au Conseil des droits de l’homme en 2016.

Version complète du communiqué de fin de mission du Groupe d’experts de l’Onu.

Illustration: De gauche à droite et de haut en bas:Abou Iyadh, en fuite en Libye, Aboubaker El-Hakim et Kamel Zarrouk, en fuite en Syrie.

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