«La constitution me donne le droit de briguer un second mandat. Or, je n’utiliserai pas ce droit sauf si c’est dans l’intérêt de la Tunisie. Je suis toutefois contre l’idée de la présidence à vie», a déclaré le président de la république, Béji Caïd Essebsi.
M. Caïd Essebsi ne dit pas encore clairement qu’il sera candidat à sa succession, mais il suggère tout de même qu’il pourrait être tenté d’y aller… dans l’intérêt de la Tunisie, dit-il, pas du sien et de celui de son clan. Non, bien sûr !
Qu’il est loin le temps où M. Caïd Essebsi affirmait, la main sur le cœur, qu’il ne se présenterait pas pour un second mandat ! Il faut dire que, depuis 2015, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et, surtout, dans la maison des Caïd Essebsi. Aussi, rester à Carthage sera-t-il donc pour lui et sa progéniture une assurance contre les coups durs du destin.
Dans une interview accordée au journal « Al-Arab » publiée aujourd’hui, mardi 29 janvier 2019, le chef de l’Etat indiquait aussi que le mouvement islamiste Ennahdha a aidé le chef du gouvernement, Youssef Chahed, à créer son parti Tahia Tounes pour lui permettre de rester au pouvoir. Le parti de Rached Ghannouchi apportera secrètement son soutien à M. Chahed lors des présidentielles de 2019, a affirmé M. Caïd Essebsi, qui semble piaffer d’impatience d’avoir Chahed comme adversaire à la prochaine présidentielle.
Selon M. Caïd Essebsi, une nouvelle «troïka», composée par Ennahdha, Machrou Tounes et la Coalition nationale, a vu le jour sur la scène politique.
«La constitution en Tunisie stipule que le président de la république et le chef du gouvernement représentent le pouvoir exécutif. Chacun a ses tâches et c’est une chose négative qui nécessite d’être changé. Car si le président de la république n’approuve pas la composition d’un gouvernement ou qu’il n’est pas consulté, le chef du gouvernement devient alors le seul représentant du pouvoir exécutif. Et ceci renforce la position d’Ennahdha sur la scène politique», a expliqué le chef de l’Etat. Et d’ajouter : «Si l’intérêt de la Tunisie n’était pas notre priorité, nous aurions effectué quelques changements dans la constitution, comme par exemple en permettant au président de la république de donner son avis sur la composition du gouvernement et de l’approuver avant sa présentation au parlement».
Ce long développement prouve que le dernier remaniement du gouvernement effectué par M. Chahed est resté en travers de la gorge de M. Caïd Essebsi, qui aurait sans doute été beaucoup plus à l’aise dans un système hyper-présidentiel où il aurait incarné seul le pouvoir, comme ce fut le cas sous Bourguiba et Ben Ali. Il sent, à juste titre, qu’il détient un pouvoir au rabais…
Sur un autre plan, le locataire de Carthage a indiqué que le mouvement islamiste nie toujours l’existence d’une organisation secrète impliquée dans l’assassinat des dirigeants de gauche, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Or, il aurait mieux fait, selon lui, d’œuvrer pour faire toute la vérité sur cette question au lieu de se perdre en dénégations.
E. B. A.
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