La fuite en avant de l’UGTT dans son irresponsable bras-de-fer avec le gouvernement est en train d’écorner gravement la crédibilité de la centrale syndicale auprès des Tunisiens.
Par Salah El Gharbi
Autant on comprend que la l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) puisse critiquer l’action gouvernementale, autant notre consternation est grande en écoutant les déclarations de certains membres du bureau exécutif de la centrale syndicale s’acharnant contre le ministre de la Santé Said Aidi, en l’accusant de «raideur» et en menaçant de paralyser un secteur aussi vital que celui de la santé.
En fait, que reproche-t-on à M. Aidi ? De vouloir réformer un établissement, l’hôpital universitaire Habib Bourguiba de Sfax en l’occurrence, gangréné par la corruption et dont les dettes sont devenues abyssales ? Lui reproche-t-on d’avoir nommé un nouveau directeur, Chokri Tounsi, certes issu de l’armée nationale, mais un homme d’expérience et qui a déjà prouvé sa compétence et son intégrité en dirigeant d’autres établissements hospitaliers ? Lui reproche-t-on de défendre l’intérêt général, celui de la communauté nationale, contre ceux d’une coterie soucieuse de maintenir ses privilèges et d’imposer sa loi au service public ?
Il est légitime que le syndicat joue son rôle de force de contestation, se constitue comme un contre-pouvoir, tout en défendant les intérêts de ses affiliés, contribuant ainsi au progrès social du pays. Toutefois, dans l’affaire de l’hôpital universitaire Habib Bourguiba de Sfax, les «syndicalistes» semblent se tromper de combat. L’enlisement de la situation est inquiétant et ne peut qu’être préjudiciable pour la crédibilité même des membres du bureau exécutif. D’ailleurs, place Mohamed Ali, on est sur la corde raide. Mais, la tentation reste de céder au diktat des barons régionaux de la centrale syndicale. Car, dans cette histoire, ce sont les intérêts particuliers et les jeux politico-syndicalistes qui semblent déterminer la posture à prendre. On préfère mettre en difficulté un ministre, paralyser un service public vital pour tout le sud tunisien plutôt que de cesser de cautionner des actions qui n’ont rien à voir avec l’action syndicale.
En effet, si cette crise perdure, c’est qu’elle sévit dans un bastion électoralement utile, que les maitres de la centrale cherchent à ménager, en le soutenant contre vents et marées, aux dépends des intérêts collectifs, ceux de ces «miséreux» qu’on se targue de vouloir défendre et qui ont réellement besoin des services de cet hôpital.
Dans une récente déclaration, Houcine Abassi , secrétaire général de l’UGTT, a déclaré que la privation était une des causes de la crise que traversait le monde arabe. Cette analyse qu’aucun économiste sérieux ne saurait cautionner traduit l’une des préoccupations majeures du monde syndical qui, chez nous, prospère sur le dos du service public où l’on bénéficie de l’indulgence d’un gouvernement soucieux de ménager la susceptibilité d’une «gauche» pauvre en propositions, mais de plus en plus remuante et destructrice.
Plus grave encore: M. Abassi a multiplié récemment les déclarations où il reproche au chef du gouvernement Habib Essid de ne pas l’avoir consulté avant de procéder aux nominations au sein de son gouvernement. On croit rêver… mais c’est un cauchemar que vit notre pays où ceux qui sont censés être les gardiens du temple de la rigueur politique et de l’intégrité morale se révèlent être ses plus acharnés démolisseurs. C’est à croire que le prix Nobel de la paix attribué au Quartet du dialogue national, dont l’UGTT, a fait tourner la tête de M. Abassi et de ses camarades qui ont cru pouvoir postuler à prendre les rennes du pouvoir dans le pays!
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