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Tunisie : Cherche chef de gouvernement désespérément

Palais-du-Gouvernement-Kasbah

Avant de lancer des noms d’improbables candidats, on doit brosser un portrait-robot du prochain chef de gouvernement et définir les critères devant présider à son choix.

Par Mohamed Chawki Abid *

Le sort d’Habib Essid, patriote et intègre, sera scellé au terme de son audition à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) prévue pour ce samedi 30 juillet.

De jour en jour, les Tunisiens deviennent de plus en plus conscients que l’initiative du président de la république Béji Caïd Essebsi pour la formation d’un gouvernement d’union nationale traduit une volonté du locataire du Palais de Carthage d’écarter un Premier ministre respectueux de la Constitution, mais jugé «rebelle», et d’installer un béni oui-oui qui arrange l’entourage présidentiel.

Si les souscripteurs à l’initiative du chef de l’Etat voulaient réellement identifier un homme clé susceptible d’ériger un gouvernement de combat, ils devraient au préalable délimiter le terrain de prospection: la morale, l’honnêteté, l’intégrité, le patriotisme… Vient ensuite l’étage du savoir-faire : compétence, efficacité, expérience, persévérance, clairvoyance… Le fait d’adopter une démarche différente, par exemple centrée sur la satisfaction des partis ou des lobbys d’intérêt, risque d’orienter le débat vers des raccourcis entachés de calculs étriqués, de subjectivité et de contrevérité.

Un profil introuvable

Dans un contexte de crise politique, de chaos socio-économique, et de vulnérabilité sécuritaire, la Tunisie aurait besoin d’un chef de gouvernement qui serait patriote et consciencieux, intègre et incorruptible, honnête et sincère, responsable et audacieux, indépendant et impartial, charismatique et intransigeant, conducteur et meneur d’homme, clairvoyant et entreprenant, respecté et respectueux, expéditif et catalyseur, proactif et planificateur, communicateur et transparent.

Il serait hypocrite de considérer que le sauvetage du pays se résume à la formation d’un gouvernement d’union nationale. Il serait suicidaire d’identifier un leader politique et de former un cabinet constitué de politicards, au prorata de la représentation des partis au parlement. Il serait criminel d’y reconduire les éléments générateurs de l’échec, particulièrement ceux ayant brillé par leur contre-performances économiques dans le gouvernement en place.

Comme les mêmes causes produisent les mêmes effets, quelles que soient les qualités managériales du successeur choisi, il ne pourrait point renverser la vapeur et relever les défis socio-économiques, si ces conditions minimales n’étaient pas réunies:

– la concentration du cabinet autour d’une douzaine de portefeuilles;

– l’impartialité de ses membres avec déclaration préalable de leurs patrimoines;

– l’engagement de combattre toutes les formes de malversation et d’intervention corporatiste;

– et le recours aux expertises nationales pour bien agir en pompier et planifier les actions curatives requises.

Les candidats se bousculent

En dépit des menaces qui guettent le pays, les conseillers de Carthage continuent à diffuser des noms de candidats ne correspondant pas aux défis à relever, dont certains ministres ayant brillé par leur échec et par leur allégeance aux Caïd-Essebsi père et fils.

Le dernier candidat évoqué est Hatem Ben Salem, actuel directeur de l’Institut tunisien des études stratégiques (Ites). Avant de lui faire une évaluation objective selon les critères sus-indiqués, nous serions curieux de connaître ses principales réalisations à l’Ites, un an après sa prise de fonction, et d’apprécier ses performances générales.

On peut sérieusement craindre que le nouveau locataire du Palais de la Kasbah aille faire l’autruche face au comportement scandaleux de la «familia» de Carthage avec les lobbys des rentiers et les associations de malfaiteurs, et par suite accélérer l’enlisement irréversible du pays dans le sable mouvant pour déclencher un douloureux ras-le-bol populaire. Si ceci venait à se concrétiser, les nouveaux princes plieraient bagages en moins d’un an, avant de prendre la fuite pour être à l’abri d’un éventuel retour de manivelle.

Qui a dit que l’histoire est un éternel recommencement ?

* Ingénieur économiste.

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