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Pourquoi la Tunisie est-elle devenue le 1er pays «producteur» de terroristes ?

Auteurs des attentats de Nice et Berlin, Anis Amri et Mohamed Lahouaiej Bouhlel. 

Si la Tunisie est devenue un vivier de terroristes, c’est parce qu’il a eu deux gouvernements conduits par le parti islamiste Ennahdha, en 2012 et 2013.

Par Chedly Mamoghli *

La Tunisie est le premier pays pourvoyeur de terroristes rapporté à la population. Nul ne peut le contester. Les terroristes tunisiens ont opéré aussi bien en Orient qu’en Occident. Et bien évidemment, et d’abord, en Tunisie. C’est devenu une réalité très amère à laquelle nous sommes confrontés.

Pourquoi la Tunisie, diriez-vous? Pourquoi ce n’est pas la Libye ou l’Egypte qui exportent le plus de terroristes dans le monde? Et bien il y a, au moins, deux raisons.

Ennahdha est passé par là

D’abord pour la simple raison que nous Tunisiens avions eu le malheur d’avoir deux gouvernements conduits par le parti islamiste Ennahdha, entre 2012 et 2013, qui ont fermé les yeux sciemment et laissé les jeunes embrigadés par les groupes jihadistes partir en Syrie et en Irak via la Turquie et la Libye.

C’est la raison principale et les responsables de ce drame devraient être jugés car ils ont fait de la Tunisie, un pays jusque-là pacifique et paisible, un vivier de terroristes. Donc cette première raison relève d’un choix politique délibéré.

La seconde raison est dans le profil sociologique du Tunisien qui est devenu une proie facile, car même à l’extérieur des frontières, des individus ont été recrutés et instrumentalisés en Europe, comme les tueurs de Nice et de Berlin, Mohamed Lahouaiej Bouhlel et Anis Amri. Et là les autorités et les experts, surtout les sociologues, doivent se pencher sur ce problème. Nous avons besoin d’explications. Et, surtout, de remèdes.

‘‘Le Figaro’’, ‘‘Le Point’’ et d’autres médias de renommée, qu’ils soient français, italiens, allemands ou autres, ont fait état de cette réalité. Ils ont affirmé que notre pays est devenu le vivier du terrorisme mondial. C’est malheureux mais c’est un fait.

Bien sûr, les bobos, les droits-de-l’hommistes, les anti-occidentaux primaires et les abrutis – pour qui, nous Tunisiens, sommes le meilleur peuple du monde quoi qu’il fasse – sont dans le déni de réalité. La vérité leur fait mal, très mal comme si ceci relevait de la fiction.

Bons islamistes et méchants occidentaux

Certes, traditionnellement, nous ne voulons jamais nous remettre en cause et nous rejetons toujours la responsabilité sur les autres. Ce n’est jamais notre faute, c’est toujours celle des autres. Nous sommes confrontés à ce drame, il faut l’assumer et non pas tourner le dos et jouer les éternels victimes et les éternels boucs émissaires des «méchants occidentaux». Ce n’est pas de l’auto-flagellation mais sans remise en cause, nous n’avancerons jamais.

Notre image est ternie, salie et souillée dans tous les pays, dans tous les aéroports, dans toutes les ambassades et dans tous les consulats. Les emplois à l’étranger, les visas et les titres de séjour sont devenus très difficiles pour les Tunisiens et le seront davantage.

Bien sûr, les idiots utiles préfèrent écouter, en ayant les larmes aux yeux, les politiciens, les diplomates et les journalistes hypocrites qui leurs disent que nous sommes les plus démocrates, les plus pacifistes et les surdoués du monde arabe. Ces consommateurs de la langue de bois jubilent quand ils sont encensés.

Que va-t-on faire maintenant? Comme les autres fois, on va envoyer Selma Elloumi Rekik, ci-devant ministre du Tourisme, à la tête d’une délégation, au début de la semaine prochaine ou au début de l’année, pour dire aux Allemands : «Nous sommes beaux, nous sommes gentils et nous sommes tolérants. Venez chez nous et investissez chez nous.» Et on va continuer à demander au gouvernement britannique de lever les restrictions de voyage vers la Tunisie. Même s’il la lève et même si la sécurité s’améliore en Tunisie, les Occidentaux ne viendront pas dans un pays à l’image aussi ternie et où leurs compatriotes ont été massacrés au bardo et à Sousse, en mars et en juin 2015. Ils ne viendront pas dans un pays devenu hélas un terreau fertile du terrorisme, sans parler de l’armée de réserve djihadiste dont il dispose en Syrie, en Irak et en Libye.

Les Daechiens sont parmi nous 

Le danger qui guette la Tunisie ne provient pas seulement de ces terroristes déjà passés à l’action et des djihadistes en herbe qu’on ne cesse d’arrêter aux quatre coins du pays, il provient aussi de ce que j’appelle «les Daechiens passifs». Cette catégorie dont personne ne parle est celle des individus qui sont solidaires de l’Etat islamique (Daech), qui épousent ses idées mais qui n’ont pas (encore) combattu dans ses rangs. Ce sont des admirateurs de cette organisation terroriste et ils sont nombreux parmi nos compatriotes.

La situation est préoccupante chez nous, cette Tunisie qui durant des siècles était un havre de paix et de calme est devenue un pays pointé du doigt et dénigré. Les peuples du monde entier sont choqués par ce mauvais chemin pris par notre pays. C’est un vrai drame sociétal et si ce problème de la radicalisation des jeunes et de la prolifération de la pensée intégriste continue d’être traité d’une manière inefficace, les drames se poursuivront et notre image sera encore plus souillée.

* Juriste.

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