Les sacs en plastique jetables d’une épaisseur moins de 40 microns ne seront plus distribués dans les grandes surfaces à partir du 1er mars 2017. Il était temps.
Par Zohra Abid
Pour faire ses emplettes, il faudra désormais se munir des sacs réutilisables ou payer à la caisse un sac de 40 ou 50 micromètres pour 80 ou 90 millimes. Cette mesure, qui entrera en vigueur dans moins de 10 jours, vise à contribuer à la préservation de l’environnement.
Elle a été prise, le 11 octobre 2016, en commun accord entre, d’un côté, le ministère des Affaires locales et de l’Environnement et de l’autre, les grandes surfaces dont Géant, Carrefour, Monoprix et Magasin général.
Un comportement citoyen
Pour garantir le succès de cette initiative, il faut d’abord sensibiliser le consommateur aux problèmes de la protection de l’environnement et l’inciter à s’adapter au changement de ses habitudes. Il faut aussi aider les industriels à adopter d’autres alternatives.
«Nous sommes décidés à interdire la fabrication, l’importation et la distribution des sacs en plastique. Nous devons suivre la tendance universelle qui réussit dans les pays développés et dans d’autres qui le sont moins, comme le Maroc, le Cameroun et le Rwanda», a martelé Riadh Mouakhar, ministre des Affaires locales et de l’Environnement, lors d’un petit-déjeuner de presse, le mardi 21 février 2017, dans un restaurant aux Berges du Lac de Tunis.
M. Mouakhar, qui s’était entouré de plusieurs députés, militants syndicalistes et représentants d’associations environnementales, a tenu à rappeler que ce projet avait été discuté et validé par les députés et démarré par son prédécesseur. «Ce projet n’est qu’un premier chantier que nous venons d’ouvrir dans le domaine de l’environnement. D’autres suivront», a-t-il enchaîné.
Mettre fin à une catastrophe environnementale.
Pour de nouvelles alternatives
Le ministre a rappelé qu’il s’est attelé à la mise en oeuvre de ce projet dès la 2e semaine de sa nomination. Pour en mettre les premiers jalons, il a commencé par en discuter avec des responsables à l’Utica, afin de trouver une solution avec les sachetiers, les industriels des sachets en plastique, qui y étaient opposés car il menaçait leur filière.
M. Mouakhar a aussi rappelé que les Tunisiens utilisent plus d’un milliard de sacs en plastique par an et ce marché ne représente que 20 millions de dinars tunisiens (MDT). «Le ratio d’employabilité de ce secteur est très faible, car il n’emploie que quelques centaines de personnes», a-t-il tenu aussi à souligner.
Cependant, une étude a été réalisée pour identifier les moyens d’accompagner les industriels afin qu’ils adoptent des solutions alternatives. «C’est ainsi qu’on a décidé de maintenir en usage les sachets à partir de 40 microns et de mettre fin à la fabrication de ceux de 10 à 20 microns», a-t-il précisé. Les industriels n’ont, en réalité, rien à perdre puisqu’il n’y aura pas de changement dans la chaîne, «ni au niveau des machines ni dans le système de coupure ou de soudure», a ajouté le ministre.
Il y aura néanmoins des difficultés pour amener le citoyen à changer son comportement. «Nous comptons sur les médias pour nous aider à sensibiliser le Tunisien sur la nécessité de ne plus utiliser les sacs en plastique qui polluent durablement l’environnement», a insisté Riadh Mouakhar. D’autant que des solutions existent, comme le retour aux emballages en papier kraft, en tissu ou en halfa, comme les couffins jadis utilisés par nos ancêtres avant l’avènement des sacs en plastique, «dont la dégradation nécessite 4 siècles alors que leur temps de fabrication ne dépasse guère une seconde et leur utilisation un petit quart d’heure», a expliqué le ministre.
Il existe, en effet, dans les pays respectueux de l’environnement, plusieurs alternatives, dont des sacs faits à base d’une matière biodégradable comme la fécule de pomme de terre, de l’amidon, des matériaux qui se dégradent, tout au plus, en un mois. C’est une orientation possible et les industriels tunisiens seraient bien inspirés de s’y engager dès aujourd’hui, mais nous n’en sommes pas là. Il y a encore du chemin à faire.
D’autres décisions seront prises et le gouvernement procédera progressivement et par étapes pour obliger les citoyens à respecter l’environnement. Parmi ces décisions, la mise en place, avant la fin de 2017, d’une police environnementale, dont la mission est de surveiller et de sanctionner les abus dans ce domaine.
Pour un environnement sain
Mais qu’en pensent les responsables des grandes surfaces? Hédi Baccour, DGA du Groupe Magasin général, a indiqué à Kapitalis que le secteur de la grande distribution fait des efforts en faveur de l’environnement. «Nous respectons, aujourd’hui, le recyclage des huiles, le repos biologique dans la pêche (notamment du thon rouge, du poulpe), la propreté dans nos magasins. Nous avons ainsi réservé un local pour les poubelles afin de les mettre hors de portée des « barbacha » (fouilleurs de poubelles, Ndlr)», a-t-il expliqué.
Les grandes surfaces participent souvent à des actions écologiques, notamment en faveur de la propreté des plages. «Le fait de réduire l’usage des sachets en plastique va nous aider à faire face au problème de la prolifération des méduses dans nos plages», a-t-il ajouté.
A-t-on trouvé des solutions pour l’emballage des fruits, légumes, poissons et viandes? Réponse de M. Baccour : «Ce sera des sachets ultra légers et sans bretelles que le client ne pourra pas réutiliser. Ce genre de sachet est fait juste pour permettre d’acheminer le contenu du magasin jusqu’à la maison. Pour les grandes emplettes, nous proposons des sacs à vie, dont le prix de l’unité est à 1,5 DT. Une fois usés, on récupère ces sacs recyclables auprès des clients et on les leur remplace par d’autres», a-t-il conclu.
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