Le tourisme de masse et bon marché pratiqué par la Tunisie finit par être destructeur et contraint la population à hypothéquer son avenir en acceptant de voir dilapider à pertes et profits ses richesses naturelles.
Par Wael Mejrissi
La saison touristique bat son plein et visiblement le ministère du Tourisme et l’Artisanat s’en réjouit étant donné que cela vient renflouer notre stock de devises au plus bas et dynamiser notre économie par la relance de la consommation.
Cependant, ces touristes que les autorités ont courtisés pendant longtemps pour qu’ils reviennent sur notre sol sont-lis vraiment la clé de la relance de notre économie? Rien n’est moins sûr mais vu que les solutions alternatives pour redonner du pouvoir d’achat aux Tunisiens n’existent pas…
De graves sacrifices écologiques
La Tunisie, faute d’être à l’initiative d’une réflexion globale sur les limites et les méfaits du tourisme de masse, se rend dépendante de cette manne financière devenue une bouffée d’oxygène à court terme mais par la même concède un grave sacrifice écologique à moyen et long terme.
Les grandes chaînes hôtelières du pays, de Tabarka à Djerba en passant par Yasmine Hammamet, Sousse, Monastir et Mahdia, offrent des prestations de plus en plus généreuses aux touristes qui eux sont de plus en plus exigeants vu la concurrence féroce dans ce secteur.
Les formules all inclusive sont souvent celles choisies par les vacanciers et génèrent par conséquent l’achat de stocks de nourriture en quantités vertigineuses contribuant de facto à leur renchérissement pour les ménages nationaux.
Ces affiches attractives deviennent à notre époque un non-sens économique dans la mesure où le résident tunisien paie des prix quasi-prohibitifs à la caisse tandis que le touriste paie ces mêmes denrées beaucoup moins cher, faisant ainsi porter le poids de ses caprices consuméristes à la population locale.
Les denrées alimentaires deviennent en Tunisie de plus en plus difficile d’accès alors que les tours opérateurs arrivent à négocier pour leurs clients des formules avec restauration complète défiant toute concurrence.
Une économie totalement inefficiente
Cette répartition socialement injuste rend notre économie totalement inefficiente d’autant que, et c’est le comble absolu, des quantités scandaleuses de nourriture finissent aux ordures chaque jour dans ces mêmes hôtels.
Difficile dans ces conditions de croire que ce tourisme de masse est porteur d’une prospérité économique ou d’une quelconque création de richesse.
Ajoutons également que ces hôtels de luxe consomment des quantités d’eau totalement déraisonnables dans un pays où les nappes phréatiques sont en souffrance absolue.
L’eau étant une ressource en pleine raréfaction, il n’est plus possible de continuer à gaspiller cette dotation que nous n’avons même plus en quantité suffisante pour les résidents tunisiens eux-mêmes.
Chaque été de nombreux foyers sont touchés par des coupures d’eau pendant plusieurs jours, imputées directement aux tensions grandissantes sur cette ressource naturelle. Mais étrangement nous trouvons de quoi fournir cette eau et en quantité illimitée à une clientèle très loin des préoccupations sociales et environnementales. Or les capacités de production et de renouvellement de notre agriculture et de nos nappes phréatiques ne sont pas infinies et le niveau de l’inflation est là pour nous le rappeler.
Ce tourisme de masse que nous accueillons les bras ouverts finit donc par être destructeur et nous contraint à hypothéquer notre avenir en acceptant de voir dilapider à pertes et profits nos richesses naturelles.
Sans parler des déchets dont les hôtels sont de grands pourvoyeurs qui détériorent gravement notre air, notre sol et tout l’écosystème de notre territoire. Le tri et le recyclable des déchets étant encore à des années-lumière de notre culture faute d’une prise de conscience qui tarde à venir.
Voilà pourquoi notre pays ne peut plus faire l’économie d’une démarche citoyenne engagée où se conjuguent harmonieusement tourisme et respect environnemental ou alors nous allons au devant d’un cataclysme sanitaire et écologique que nos futures générations paieront très cher.
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