«Donnez-moi un fouet que je lui rappelle ses origines d’esclaves», a commenté une Tunisienne sur Facebook, en s’adressant à un noir. Ce dernier, soutenu par la société civile, portera plainte. Cette affaire accéléra-t-elle le vote du projet de loi contre discrimination raciale ?
Le commentaire de Leila T., une Tunisienne prônant son opposition aux propositions de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe), a provoqué la colère de ses compatriotes. La dame a agressé verbalement, lors d’un échange sur les libertés individuelles et notamment sur l’homosexualité, Anthony Gianni, un jeune noir travaillant à Tunis. Elle l’a dénigré sur ses origines raciales et sa couleur de peau.
«Depuis quand les nègres ont-ils le droit à la parole. Ils t’ont sorti de l’esclavage et tu te crois tout permis. Donnez-moi un fouet que je lui donne une petite correction, que je lui rappelle ses origines d’esclaves», a-t- elle osé écrire, et d’enchaîner dans un langage plutôt vulgaire (on a biffé les gros mots pour ne pas heurter davantage les lecteurs) : «Moi qui ai toujours défendu les immigrés noirs en Tunisie, je pense qu’il serait temps qu’ils retournent chez eux. Il ne manquerait plus que des Africains foutent le trouble en Tunisie».
Ce commentaire de Leila, que beaucoup ont trouvé bête et méchant, a été largement partagé sur les réseaux sociaux et provoqué une grande polémique parmi les internautes. Sans surprise, Anthony a bénéficié du soutien d’un grand nombre de Tunisiens, qui se disent navrés de l’attitude de cette dame, qui, disent-ils, ne représente pas la Tunisie, plutôt ouverte et tolérante.
Contacté par Kapitalis, Anthony a expliqué qu’il va porter plainte contre cette dame pour qu’elle et ses semblables comprennent que le racisme est un crime.
«Merci pour l’élan de solidarité dont ont fait preuve les Tunisiens. Je suis noir de peau, et je porte sur moi ma plus grande fierté. Les paroles de Leila ne m’ont pas atteint mais si j’en parle et si je veux porter l’affaire en justice, c’est pour que les choses changent. Que l’idée arrête de se répandre, parce que c’est une idée, ce n’est pas la personne en elle-même qui est mauvaise, mais c’est l’idée qui est mauvaise», a-t-il dit. Et d’ajouter «J’en parle pour que les gens comprennent que ce n’est pas une blague et qu’en Tunisie, le racisme est un fait réel qui n’a jamais arrêté et qu’il faudrait que ça s’arrête. Les gens doivent comprendre que c’est mal, que ça ne se fait pas et que c’est honteux».
On notera qu’Anthony n’est pas seul dans ce combat et que des activistes de la société civile le soutiennent, notamment des avocats, à l’instar de Me Abdennaceur Laouini qui se porte volontaire pour le défendre, et des Ong, telle que l’Association tunisienne de soutien des minorités (ATSM).
«La haine de l’autre, qui n’est pas le fruit de maladresse mais du refus viscéral de la différence, une fois exprimée, permet de faire prendre conscience de la dangerosité, de la saleté que peut représenter le racisme/homophobie ! La lutte contre ce ravage n’est pas une activité de club mais une guerre que nous avons tous le devoir de mener», a déploré Yamina Thabet, présidente de l’ATSM, en appelant les députés à approuver le projet de loi contre la discrimination raciale, validé par un conseil ministériel en janvier dernier.
Y. N.
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