Un président de la république sans grandes prérogatives et un chef de gouvernement sans majorité franche.
Le régime politique en vigueur en Tunisie, émanant de l’actuelle Constitution et avec l’actuelle loi électorale, maintient les Tunisiens dans le conjoncturel, dans l’immédiateté, dans les péripéties du quotidien, dans l’incertitude et dans les contingences.
Par Chedly Mamoghli *
«La force de cette Constitution c’est qu’elle permet d’éviter la tyrannie de l’immédiateté. Une absurdité contemporaine. Ce ne sont pas les péripéties du quotidien qui doivent décider pour une Nation», a déclaré, hier, jeudi 4 octobre 2018, le président français, Emmanuel Macron, lors d’une visite à Colombey-les-Deux-Eglises – commune où habitait et où repose le général de Gaulle – à l’occasion du 60e anniversaire de la Constitution de la Vème République.
La tyrannie de l’immédiateté
Le régime politique émanant de cette Constitution a permis une stabilité politique qui contraste avec l’instabilité de la IVème République par exemple avec son régime des partis et ses valses incessantes de gouvernements.
Cette Constitution a fêté hier ses 60 ans dans un pays qui a connu 15 Constitutions. Elle a ses défauts, aucune n’est parfaite, mais a permis à la France de ne pas vivre dans la tyrannie de l’immédiateté pour reprendre l’expression de Macron et de pouvoir s’atteler à la réalisation des grands projets et des vrais enjeux que connaît une nation.
Et bien chez nous, avec le régime politique émanant de l’actuelle Constitution et avec l’actuelle loi électorale, nous sommes dans le conjoncturel, dans l’immédiateté, dans les péripéties du quotidien, dans l’incertitude et dans les contingences.
L’actuelle loi électorale ne permet pas de dégager une majorité stable et par ricochet rend le pays ingouvernable. Elle doit être amendée avant la fin de l’actuelle législature pour ne pas se taper cinq autres années d’instabilité dès 2019.
Pour sortir d’un système politique faible et instable
Le pays est à bout de souffle et ne peut plus supporter ce mode de scrutin proportionnel plurinominal. Pour que le pays soit gouvernable, il a besoin d’une majorité stable, cohérente et homogène qui permettra de dégager un gouvernement avec une vision, une stratégie et un projet et qui ne sera pas condamné à mort le jour de sa naissance, qui ne survivra (car nos gouvernements depuis des années sont dans la survie permanente) pas avec l’épée de Damoclès de la destitution constamment au-dessus de la tête.
Puis dans un second temps, il va falloir amender l’actuelle Constitution, promulguée en janvier 2014, pour que le régime politique devienne plus efficace et plus efficient. Et à ce moment-là, on pourra réunir les conditions nécessaires pour s’atteler à la réalisation des grands projets qui métamorphoseront le pays que se soit dans l’éducation, dans la santé ou encore l’essentielle refonte et modernisation de l’économie qui ne pourra intervenir que dans le cadre d’un vaste projet ou d’un plan de vision cohérent et non pas à coup d’effets d’annonce ici et là.
Un vaste projet ou un plan de vision ne pourra pas voir le jour dans un système si faible et si instable et même si par je ne sais quel miracle, il voit le jour et bien il ne pourra pas être concrétisé.
Dans le système actuel, le pays est géré au jour le jour comme une épicerie. Avec le système actuel, c’est le bricolage, c’est le bricolage permanent et ça ne peut être que le bricolage car c’est un système faible et médiocre qui ne peut accoucher que de résultats faibles et médiocres. Il faut en sortir et aller vers un système solide et ambitieux. C’est ce qu’il faut pour la Tunisie.
* Juriste.
Articles du même auteur dans Kapitalis :
Dans la République des fils, le népotisme est religion d’Etat
Donnez votre avis