Le simulacre de fusion entre Nidaa et l’UPL, qui ressemble davantage à un télescopage, est tellement grotesque qu’il n’aura pas de lendemain et nous fait rappeler que l’hypocrisie est l’un des fondements de l’action politique, et surtout en Tunisie.
Par Tarak Arfaoui *
Il est bien vrai que le ridicule n’a jamais tué personne et nous en avons bien la preuve tous les jours. Ce qui se passe actuellement sur la scène politique nationale a dépassé toutes les limites de la décence. Le piteux spectacle que les partis donnent aux électeurs depuis quelque temps a fini par céder la place à un véritable cirque qui n’arrive plus à divertir le plus optimiste des Tunisiens.
Incohérence, inconsistance, chamailleries grotesques et surtout individualisme et opportunisme ont largement entamé le peu de crédit qu’avaient les élus auprès de l’opinion publique.
Les partis éclatent comme des baudruches dans une fête foraine
Le «tourisme parlementaire» (cette manie de changer de bloc comme on change de veste) a quant à lui donné le coup de grâce à la confiance que pourraient avoir les électeurs dans la sincérité des hommes politiques en général et surtout dans les dirigeants qui font semblant de tenir les rênes du pays et qui prennent les Tunisiens pour des idiots
L’éclatement des partis est devenu un fait anodin. Ettakatol et Al-Joumhouri ont disparu de la circulation. Le CPR s’est fragmenté. Le Machrou, né d’une scission dans Nidaa Tounes, s’est lui-même divisé.
Le Tunisien a perdu son latin dans les fameuses «kotla» (blocs) qui surfent au gré des intérêts personnels du moment et qui se font et défont toutes les semaines.
Les derniers événements qui n’ont cessé de secouer Nidaa traduisent l’ampleur du désastre politique dans lequel est tombé le pays.
Bien qu’ayant touché le fond, ce parti qui, rappelons-le exerce dans l’illégalité sans aucun congrès constitutif, continue d’enfoncer le clou par l’intermédiaire de son directeur exécutif autoproclamé, Hafedh Caid Essebsi, fils de son omnipotent père Béji Caid Essebsi, ci-devant président de la république. De coups de main en coup bas, de bisbilles puériles en manigances et vacheries, il tente stoïquement de s’agripper à ses commandes en s’appuyant sur une galerie d’opportunistes qui me font rappeler les viragistes du derby du dimanche.
Télécommandé par un paternel bienveillant qui, après s’être allié avec le diable (islamiste) avec le résultat que l’on connaît, vient d’avoir le génie politique de s’allier avec un tigre de papier pour redorer le blason du parti qu’il avait créé et actuellement totalement moribond.
Entourés d’une galerie d’opportunistes qui rappellent les viragistes du derby du dimanche.
Pour Slim Riahi l’argent n’a pas d’odeur même s’il sent le pétrole
Slim Riahi, le patron de l’UPL, pour qui l’argent n’a pas d’odeur même s’il sent le pétrole… libyen, ne pouvait pas rater cette aubaine pour se créer une virginité judiciaire. Son débarquement brutal à la tête de Nidaa a tout l’air d’une descente de police dans une distillerie clandestine des années trente à Chicago.Il a illico presto occupé les commandes du pressoir, fracassé les bouteilles et se prépare déjà à comptabiliser les pertes et profits de la boîte avec l’aval du tenancier qui n’a demandé aucune consultation ni des bases du parti ni de ses instances. Très bel exemple de démocratie dans les traditions putschistes d’un directoire qui n’est pas, il faut le dire, à son premier coup de main.
Ce scénario concocté en haut lieu est d’une légèreté déconcertante, un harakiri politique que seuls les sentiments paternels d’un papy bienveillant peuvent expliquer.
Ce simulacre de fusion que je qualifie de télescopage est tellement grotesque qu’il n’aura pas de lendemain et nous fait rappeler que l’hypocrisie est l’un des fondements de l’action politique.
Beji Caid Essebsi fait semblant d’oublier qu’il y a quelques années, il traitait Slim Riahi, président de l UPL, de petit nabot «ne jouant pas dans la même division que Nidaa». M. Riahi fait semblant d’oublier qu’il traitait il y a peu de temps Nidaa de «parti insignifiant et jetable» comme un mouchoir.
L’un et l’autre ont tout à fait raison mais un amour brutal, un coup de foudre semble avoir uni ces deux protagonistes pour le malheur et pour le pire. Une énième grosse bourde de notre Bajbouj bien aimé dont l’aura de semaine en semaine va hélas de Charybde en Scylla et dont le principal perdant est la Tunisie.
* Médecin de libre pratique.
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