Intitulé ‘‘Terre amère’’, le film documentaire de Mohamed Boukoum met à nu les graves problèmes qui entravent la sécurité alimentaire en Tunisie et marginalisent les petits exploitants et techniciens agricoles postulant à la location d’un lotissement agricole domanial.
Projeté récemment à Tunis en marge d’un forum sur la souveraineté alimentaire en Afrique du Nord, ce film engagé s’est appuyé sur des témoignages vivants pour dénoncer l’iniquité avec laquelle le gouvernement traite les gros et petits exploitants agricoles.
Aux premiers, il déroule le tapis le rouge et leur fournit toutes sortes d’aides, et aux seconds, il s’emploie à les appauvrir en les laissant se débrouiller avec les maigres moyens de bord jusqu’à les pousser, à terme, à abandonner le travail de la terre.
Parmi les problématiques évoquées dans ce film documentaire figurent la carte agricole, la rareté de l’eau, particulièrement dans la région de Sidi Bouzid, l’avance du sable dans la région de Kébili, les difficultés de s’approprier la terre et d’importer les semences. Une mention spéciale est faite pour les jeunes agriculteurs et techniciens agricoles qui rencontrent d’énormes difficultés pour disposer un jour d’une parcelle domaniale en vue de l’exploiter.
Le film transcende ces problématiques pour mettre en valeur le militantisme de ces exploitants et jeunes agriculteurs organisés au sein d’Ong pour résister et faire valoir leurs droits.
Au regard de la détermination des témoignages de militants comme Rim Mathlouti, présidente de l’Ong Pour une agriculture durable, et de Mourad Ben Hassine, président de l’Ong Nafas, qui lutte pour une agriculture souveraine, on est tenté de penser qu’un véritable contrepouvoir aux autorités agricoles et aux syndicats agricoles en place (Utap, Synagri…) est en train d’émerger.
Par-delà les témoignages, le film a le mérité d’attirer l’attention sur la marginalisation des petits exploitants agricoles et donner un avant-goût de ce qui les attend en cas de conclusion de l’Accord de libre échange complet et approfondi (Aleca) entre la Tunisie et l’Union européenne (UE). Cet accord asymétrique qui prévoit justement la libéralisation des échanges des produits agricoles et l’implantation dans le pays de grosses firmes agricoles et agroalimentaires européennes.
Khémaies Krimi
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