Ce n’est pas de la pandémie du coronavirus que beaucoup de Tunisiens risquent de mourir, mais plutôt du connerie-virus qui s’empare d’eux à chaque crise.
Par Mohamed Sadok Lejri *
Les boulangeries des quartiers populaires de l’ouest de Tunis, notamment la Cité Ettadhamen, Intilaka et M’nihla, étaient vides et les produits d’alimentation les plus ordinaires et à base de farine faisaient défaut. Cela a failli provoquer des émeutes dans les quartiers cités, dont les habitants ont investi en groupes les boulangeries de la zone huppée environnante, à savoir les Jardins d’El-Menzah, El-Menzah IX, El-Manar, etc., pour acheter des baguettes par dizaines.
D’aucuns sont mêmes allés jusqu’à user de l’intimidation avec les boulangers qui rechignaient à leur vendre du pain en grande quantité. D’ailleurs, une grosse frayeur s’est emparée de la patronne d’une boulangerie située à El Menzah IX, Les trois cerises, de la rue Ali Ayari pour ne pas la nommer. Elle a, malgré tout, fait contre mauvaise fortune bon cœur et poursuivi son travail, mais avec les yeux dans le dos et le rideau de fer à moitié baissé.
J’ai parlé, tout à l’heure, avec plusieurs patrons de boulangerie et ils sont unanimes : certains fournisseurs profitent de la pénurie de farine qui sévit actuellement en Tunisie pour écouler leur marchandise au marché noir. J’ai un ami qui gère une boulangerie à la Cité El Intilaka, Boulangerie H’soumi. Il m’a assuré que la quantité de farine dont il dispose maintenant lui permettra de tenir deux ou trois jours, et pas un jour de plus. Après cela, si la pénurie persiste, il baissera le rideau de son commerce jusqu’à nouvel ordre.
Si les autorités ne parviennent pas à tuer dans l’œuf ce circuit parallèle qui est en train de se mettre en place, le marché noir de la farine et du pain prendra très rapidement des proportions inquiétantes.
Les connards et les cyniques qui sont en train de prendre part à l’éclosion de ce nouveau marché parallèle doivent absolument être châtiés de la manière la plus sévère et sans délai ni pardon; tous, des instigateurs et «têtes pensantes» aux seconds couteaux.
Ce n’est pas le coronavirus qui tuera les habitants de ce pays, mais le virus de la connerie, le connerie-virus, contre laquelle il sera encre plus difficile de trouver un vaccin efficace!
* Universitaire.
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