Portrait d’Olfa Marouani, une jeune conseillère municipale, travailleuse, battante et dévouée à sa commune, qui a réussi à s’attirer le respect de ses collègues et à gagner la confiance de ses administrés. C’est avec ces jeunes pousses que la jeune démocratie tunisienne saura triompher des obstacles et des pesanteurs de toutes sortes.
Par Kamel Eddine Ben Henia *
L’heure de la relève a sonné en Tunisie. C’est pourquoi il faut tirer de l’anonymat certaines personnes parmi les jeunes, femmes et hommes, pour essayer de reconstituer une future classe politique qui nous change de celle existant actuellement, issue d’une élite inconsistante et qui a déjà largement prouvé son incompétence. Pour cela, nous devons commencer par mettre en lumière les compétences féminines, souvent confinées dans un rôle d‘exécution, ce qui empêche l’émergence de nouveaux espoirs, par des préjugés sexistes qui dominent encore les esprits.
Au-delà d’une parité formelle ou purement symbolique
La femme est l’égale de l’homme et la Tunisienne est une citoyenne à part entière; elle vit et agit dans une Tunisie libre et participe au développement économique, social et culturel de la nation, qu’elle fait profiter de son intelligence, se sa probité et de sa capacité à relever les défis du progrès. C’est dans ce nouveau contexte que la question féminine doit être désormais posée, car la Tunisienne ne peut pas rester éternellement confinée dans des rôles subalternes. Elle veut aussi avoir le pouvoir, à tous les niveaux de responsabilité, et pas seulement au nom d’une parité formelle ou purement symbolique. Elle veut être reconnue pour elle-même et pour ses capacités à répondre aux exigences de ses compatriotes.
C’est ainsi qu’une élite féminine tunisienne s’est constituée, et s’est installée solidement et définitivement dans la vie publique. Et elle revendique le droit d’accès à tout ce que l’homme considère comme un pré carré, où l’égalité n’a pas cours, alors que la loi prévoit une égalité entre les hommes et les femmes surtout dans l’espace public.
Parmi les femmes qui ont brillé récemment par leur engagement et leur dévouement à l’intérêt général, et qui sont restées anonymes et méconnues, alors qu’elles méritent toute notre attention, ne fut-ce que pour les inciter à aller encore de l’avant sur la voie qu’elles se sont tracée, je voudrai parler dans cet article d’une conseillère municipale à la mairie de Ben Arous, qui a défrayé la chronique durant la première année de sa prise de fonction, et a été combattue pour son indépendance et son insoumission.
Un long combat pour la reconnaissance
Olfa Marouani, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, est enseignante de son état, indépendante, par principe de citoyenneté, mais très attachée au partage des compétences au niveau de la gestion de la commune.
Cette femme a fait face à tout ce qu’on peut imaginer comme pressions, visant à la faire fléchir, dans une indifférence totale de ceux qui devaient s’aligner sur les principes qu’elle cultive et s’opposer farouchement, comme elle, à toute atteinte à l’intérêt général et au bien collectif. Face à tant d’adversité, on imagine le désarroi de cette jeune femme qui venait juste de mettre un pied dans la vie publique, mais on mesure aussi sa détermination et son refus d’abdiquer, la riposte étant souvent son mot d’ordre et la volonté de se battre son principal moteur.
Son combat n’a d’ailleurs pas tardé à aboutir, puisqu’elle a fini par acquérir son droit à l’exercice citoyen et a réussi à convaincre les plus réticents de sa capacité à jouer pleinement son rôle dans un contexte d’hostilité. Olfa Marouani a finalement été adoptée par tous les responsables régionaux et on la retrouve aux premières loges dans chaque manifestation. C’est elle, par exemple, qui supervise la commission de l’éducation, de la culture et de l’art, où elle a fait ses preuves. Elle préside aussi les cérémonies de mariage, tâche dont on l’a privée au début, et intervient partout ou on a besoin d’elle, son courage et sa rage de vaincre en ont fait une vraie battante.
La jeune responsable locale s’est imposée par sa volonté de partager les compétences et joue pleinement son rôle de conseillère absolument désintéressée. Récemment, on l’a vue aux côtés du président du conseil municipal, supervisant personnellement la désinfection de tous les établissements scolaires de la commune, après un long et pénible travail de leur remise en état.
C’est ce genre de femme qui mérite d’être arrachée au néant de l’anonymat, car la Tunisie a vivement besoin d’assurer la continuité de ce qui a été réalisé des décennies durant. Beaucoup des acteurs actuels n’ayant pas fait bon usage de l’héritage qui leur a été légué, il faut faire la lumière sur toutes nos jeunes compétences, surtout parmi les femmes qui sont dignes de l’égalité qu’elles revendiquent.
* Ancien cadre de l’Etat.
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