Accueil » Tunisie : Moncef Marzouki ou «l’instabilité identitaire» en politique

Tunisie : Moncef Marzouki ou «l’instabilité identitaire» en politique

Quand Marzouki déroulait le tapis rouge du Palais de Carthage aux islamistes radicaux.

Le peuple tunisien vous surnomme «Tartour» (marionnette). Un surnom qui pourrait être, à la rigueur, méprisant et à la fois drôle. Mais vous aviez été surtout l’homme le plus dangereux pour ce pays et ses institutions.

Par Helal Jelali *

Samedi 9 octobre 2021, vous appelez de Paris, en France, un pays ami et partenaire important de la Tunisie, à dénoncer un «putsch» dans votre pays. Avez-vous oublié d’avoir défendu dans les médias français votre «employeur», le parti islamiste Ennahdha, («une fraction modérée de l’islamisme», diriez-vous), en traitant la France de pays islamophobe et certains de vos opposants de «laïcards et de francophones déconnectés». Ces déclarations reprises par Le Monde, Le Point et L’Express, le 12 décembre 2011 – vous ont valu une réponse cinglante de l’ancien ministre et député français Bernard Debré publiée par Gnet News, qui vous demandait de ne pas «faire tomber la Tunisie dans l’obscurité ou l’obscurantisme».

Votre tribune la plus dangereuse a été publiée par Gnet News le 9 novembre 2011 sous le titre «Plaidoyer pour la langue arabe». Inqualifiable, traiter le français  de «cancer linguistique» et le franco-arabe de «langue de la bourgeoisie tunisoise, qui traite les autres de plouc» (sic!).

Sachez que depuis 4 siècles avant J.-C., le Tunisien est bilingue, multiculturel et pour faire bref : méditerranéen, oriental et africain. L’identité n’est pas une pièce de musée immuable. L’identité d’un peuple c’est aussi ses projets pour l’avenir. 

Le serviteur zélé des islamistes radicaux

Avez-vous oublié quand vous avez reçu une étudiante complètement «niqabée» au Palais de Carthage. Ce n’est pas de la tolérance de votre part mais une pédagogie dangereuse pour les jeunes tunisiennes et un message d’alliance avec les salafistes d’Ansar Charia, qui ne tarderont pas à commettre des massacres dans le pays contre les «mécréants» et les «ennemis de l’islam».

Monsieur l’ex-président intérimaire, non élu et qui devez votre poste à l’adoubement de vos employeurs islamistes, vous avez accueilli à bras ouvert, au Palais de Carthage, la milice d’Ennahdha, les membres de la Ligue de protection de la révolution (LPR), qui s’acharnait violemment sur l’UGTT et les opposants au parti islamiste qui venait d’accéder au pouvoir.

Quelle indignité quand vous avez gardé bouche cousue lors des attaques des théâtres, des salles de cinéma et même des galeries de peinture par vos amis islamistes radicaux ! Les discussions  avec les salafistes venus des pays du Golfe étaient, pour vous, plus urgentes…

En 2013, les villes moyennes du centre du pays étaient gouvernées par la «police islamique». Est-ce que vous avez demandé des comptes à Ali Larayedh, le ministre de l’Intérieur islamiste de l’époque? Lequel, au passage, ne vous a pas transmis l’alerte d’un service renseignement étranger sur le projet d’assassinat du député de gauche Mohamed Brahmi, le 25 juillet 2013, jour de célébration de la fête de la république!

Le président d’Ennahdha Rached Ghannouchi vous a utilisé comme une marionnette et vous a jeté comme un mégot… La preuve: lors de l’élection présidentielle de 2019, vous n’avez récolté que 2,97 % des suffrages au cours du 1er tour. Tous vos amis, alliés, et même vos collaborateurs ont déserté.

Un crypto-islamiste néo-fasciste

La politique est un abîme pour les novices et un enfer pour les girouettes. Votre «instabilité identitaire» dans vos choix politiques a déjà ruiné votre réputation et vous vaut le mépris de l’écrasante majorité de vos compatriotes.

Vos avez joué au VRP des islamistes auprès de certaines chancelleries, qui n’étaient pas dupes de vos tromperies. Ils ont été d’une ingratitude à la hauteur de vos dévoiements.

Vos dérives sont innombrables et polymorphes : avez-vous défendu les jeunes étudiantes non-voilées attaquées par des fanatiques à l’université d’El-Manar?

Concernant la création de l’«émirat de Sejnane» par les salafistes soutenus en sous-main par Ennahdha, avez-vous sommé votre ami Rached Ghannouchi de crier «Stop» à ceux qu’ils qualifiait, à l’époque, de ses «enfants défendant une nouvelle culture». Toujours paternel, compréhensif et accueillant avec les islamistes, les salafistes et même certains jihadistes.

Ne peut devenir démocrate celui qui veut… Vous, un intrus à la démocratie, à la politique et même à la bienséance.

Monsieur l’ex-président intérimaire, vous avez envoyé des salafistes manifester devant le siège de la télévision  publique pour que les présentateurs du journal de 20h cessent de vous qualifier de «président par intérim», ce qui est la stricte réalité. Mais quelle mesquinerie !

N’est-il pas vrai que certains hauts fonctionnaires convoqués au Palais de Carthage refusaient de s’y rendre sans leur ministre, tellement vous changiez vos décisions sur des dossiers importants ?

Parlons du «putsch» que vous dénoncez. N’avez-vous pas dit publiquement que si la rédaction de la Constitution exigeait quelques années encore, vous seriez d’accord. Ce qui vous permettrait de «garder la chaise» au chaud. Ceci n’est-il pas un putsch déguisé?

Vos dérapages sur l’ Algérie ne se comptent plus. Pays frère, voisin et allié stratégique dans la lutte contre le terrorisme mérite-t-il tant de goujaterie de votre part?

Enfin, si par hasard certains de vos amis parisiens lisent cet article, ils finiraient peut-être par vous traiter de néo-fasciste.

* Ancien rédacteur en chef dans une radio internationale à Paris.

Articles du même auteur dans Kapitalis :

Tunisie : après les militants, les technocrates et les bureaucrates, voici les universitaires !

Tunisie : Kais Saied ou la stratégie de la latence

Tunisie : «mariage arrangé» entre PDL-UGTT ou le vaudeville de la rentrée

Donnez votre avis

Votre adresse email ne sera pas publique.