Dans une déclaration à la presse après le rassemblement de protestation de ses partisans devant le siège de Hizb Ettahrir, dimanche 9 janvier 2022, la présidente du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi, a appelé le président de la république, Kaïs Saïed, à prendre les mesures nécessaires contre ce parti, qui, selon ses termes, ne croit ni à la république, ni à l’État civil, ni à la démocratie.
Par Imed Bahri
«Kaïs Saïed a accapéré tous les pouvoirs au prétexte de combattre la Confrérie (par allusion au parti islamiste Ennahdha, filiale tunisienne de l’Organisation internationale des Frères musulmans, Ndlr), mais il n’a pas tenu sa promesse», a déclaré Mme Moussi, qui cherche à montrer que le président de la république n’est pas opposé à l’islam politique et à ses représentants en Tunisie, comme il le prétend, et que ses gesticulations contre les dirigeants d’Ennahdha sont de la poudre aux yeux, étant lui-même très proche idéologiquement des islamistes, dont il lorgne clairement les électeurs.
Une organisation dangereuse qui œuvre à la destruction de l’État civil
Un certain nombre de partisans du PDL ont organisé, dimanche matin, un sit-in de protestation devant le siège de Hizb Ettahrir, à l’Ariana, au nord de Tunis, pour exiger des autorités politiques qu’elles prennent des décisions urgentes pour mettre fin à l’activité de ce parti, qu’ils considèrent comme «une organisation dangereuse qui œuvre à la destruction de l’État civil et du système républicain en Tunisie».
Mouvement islamiste radical, qui se dit hostile à la démocratie, aux élections et au système républicain en général, qui rejette la notion d’Etat-nation et qui œuvre pour l’avènement du califat islamique, Hizb Ettahrir a été autorisé par le gouvernement islamiste conduit par Hamadi Jebali, en 2012. Et les gouvernements qui se sont succédé depuis cette date, pour la plupart dominés par Ennahdha, se sont gardés de lui retirer l’autorisation. Et pour cause : Hizb Ettahrir est un mouvement de cols blancs, plutôt confiné dans les sphères des intellos conservateurs (médecins, ingénieurs, avocats, enseignants universitaires…), et qui n’a jamais présenté de candidats aux différentes consultations électorales organisées depuis 2012 en Tunisie, car il ne croit pas à la démocratie représentative, considérée comme une invention des mécréants, contraire à l’esprit de l’Etat islamique qu’ils rêvent d’instaurer, au-delà des frontières des Etats-nations actuels et de préférence sur toute la terre de l’islam, et si possible, au-delà, sur toute la planète terre.
Plainte pour harcèlement et perturbation des activités de Hizb Ettahrir
De là à dire que l’islam politique est un véritable arc-en-ciel : il a ses extrémistes violents et ses utopistes qui se gargarisent de mots et se bercent de rêves éveillés. Hizb Ettahrir, que Mme Moussi semble vouloir diaboliser, appartient peut-être à cette dernière catégorie. Car, en Tunisie, on ne lui a jamais attribué, du moins jusque-là, un acte violent…
L’avocat et membre de Hizb Ettahrir, Fathi Mustapha Khemiri, a déclaré, pour sa part, à Mosaïque que le sit-in de protestation organisé par le PDL devant le siège de Hizb Ettahrir à l’Ariana, a été dûment constaté par des huissiers de justice, et ce dans le but de porter plainte contre le parti de Mme Moussi pour harcèlement et perturbation des activités de son parti.
En termes d’activités, on ne peut pas dire que Hizb Ettahrir brille par son grand dynamisme. On ne peut pas dire non plus qu’il draine les foules ou même qu’il conteste le leadership du mouvement Ennahdha au sein de l’électorat islamiste en Tunisie, qu’il ne cherche même pas à attirer.
I. B.
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