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Qui cherche à mettre la Tunisie à feu et à sang ?

Incendie du souk de Jara à Gabès.

Une série d’incendies se sont déclarés hier, lundi 2 avril 2022, jour de célébration de l’Aid Al-Fitr, dans plusieurs régions de la Tunisie, de Bizerte au nord à Gabès au sud en passant par Ben Arous et Nabeul, et dont l’origine est encore indéterminée. Mais le fait est assez surprenant pour ne pas susciter des interrogations dans les rangs de la police, d’autant que la journée n’était pas particulièrement chaude ni venteuse.

Par Imed Bahri

Les équipes de la protection civile étaient certes réduites, en raison de la fête de l’Aid Al-Fitr, mais elles se sont déployées à temps pour venir à bout de la vingtaine d’incendies, notamment des trois plus importants survenus, à quelques heures d’intervalle, au souk de l’artisanat de Jara, à Gabès, dans une usine de friperie à Ben Arous et d’un dépôt de la Société régionale de transport de Bizerte (SRTB), à Jarzouna.

Le loup islamiste sort de sa tanière

Ce qui a suscité les soupçons sur l’origine criminelle de ces incendies presque simultanés, c’est la prompte réaction, un jour de fête religieuse, du parti islamiste Ennahdha, qui ne s’est pas contenté, dans un communiqué signé par son président Rached Ghannouchi, d’exprimer sa solidarité avec les commerçants du souk de Jara, qui ont perdu dans ce sinistre leurs commerces, et d’appeler à enquêter sur les circonstances exactes de l’incendie, mais a cru devoir exploiter politiquement le sinistre en accusant la protection civile d’être intervenue tardivement et avec des moyens faibles eu égard l’importance du feu qui a détruit les commerces, en déplorant l’absence du gouverneur, qui n’est pas issu de ses rangs, et saluant les efforts de la municipalité de Gabès, sachant que le maire s’était fait élire en 2018 sur une liste d’Ennahdha ! Suivez mon regard…

Incendie dans un dépôt de la SRTB à Jarzouna (Bizerte).

En réaction à ce communiqué pour le moins téléphoné et maladroit, plusieurs dirigeants des syndicats de police sont sortis de leur réserve d’usage pour accuser, certes à mots couverts, le parti islamiste d’être derrière la série d’incendies dont les visées politiques sont évidentes : montrer que, depuis leur départ forcé du pouvoir, le 25 juillet dernier, suite aux mesures exceptionnelles proclamées par le président Kaïs Saïed, la Tunisie brûle. C’est, en tout cas, le message que leurs partisans ont cherché à diffuser massivement pendant toute la soirée d’hier sur les réseaux sociaux.

La manœuvre est cousue de fil blanc et il faut être vraiment stupide pour ne pas voir dans la très prompte réaction d’Ennahdha un mélange de gêne et de volonté de prendre les devants pour contrer toute éventuelle accusation. Comme dit le proverbe arabe كاد المريب أن يقول خذوني (le suspect a failli crier arrêtez-moi!)

Le passé éclaire le présent

A l’appui de ces lourds soupçons, il suffit de rappeler, comme l’ont d’ailleurs fait beaucoup d’internautes, le passé criminel de ce parti qui, à chaque fois où il s’est trouvé en difficulté, a actionné ses éléments les plus extrémistes pour commettre des atteintes à la paix civile et semer le désordre dans le pays, aussi bien en Tunisie que dans les autres pays de la région où les Frères musulmans ont sévi.

Incendie d’une usine de friperie à Ben Arous.

Souvenons-nous des attaques terroristes contre deux hôtels à Monastir et Sousse en 1987, l’incendie provoqué dans un local du Rassemblement constitutionnel démocratique, ancien parti au pouvoir, à Bab Souika, au centre-ville de Tunis, en 1991, où encore les assassinats de l’ancien représentant du parti Nidaa Tounes à Tataouine, Lotfi Nagdh, en 2012, et des leaders de gauche Chokri Belaid et Mohamed Brahmi, en 2013, sans parler des nombreuses attaques terroristes à Kasserine, au Bardo, à Sousse et Tunis, contre des cibles civiles, militaires et sécuritaires.

Toutes ces attaques qui ont fait des morts ont eu lieu à des moments où le parti Ennahdha était en difficulté et les enquêtes ont toujours démontré que des éléments de la mouvance islamiste y sont directement impliqués, la responsabilité pénale et/ou politique se situant à des niveaux difficile à déterminer par une justice manquant de compétences ou de moyens, ou carrément complice, puisque les enquêtes judiciaires sur tous ces attentats terroristes ont rarement abouti à des condamnations claires et franches.

Incendie du souk de Jara à Gabès.

Kaïs Saïed en pompier pyromane

Il y a un autre élément qui désigne la responsabilité des éléments de la mouvance islamiste dans les incendies d’hier : ces incendies ont eu lieu (ou ont été provoqués) quelques heures après le discours prononcé par le président Kaïs Saïed à l’occasion de l’Aïd Al-Fitr au cours duquel il s’est clairement attaqué aux islamistes, sans les nommer, et les a accusés d’alimenter des tensions et de provoquer des désordres dans le pays afin d’empêcher l’aboutissement du processus d’assainissement qu’il avait lancé avec la proclamation des mesures exceptionnelles, le 25 juillet dernier.

Il est peut-être prématuré de lancer des accusations et attendons les conclusions des enquêtes en cours, mais ne soyons pas dupes : beaucoup d’autres enquêtes diligentées par le passé ont abouti à des accusations claires mais elles n’ont jamais donné lieu à des procès dignes de ce nom et à des condamnations suffisamment dissuasives. Donc, le pire n’est pas à écarter…

C’est pourquoi, la prudence doit rester de mise, car la saison des récoltes des céréales approche et le risque de voir des récoltes brûlées, comme cela eut lieu par le passé, doit être pris au sérieux, surtout en cette période de hausse des prix du blé et de l’orge sur les marchés internationaux.

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