Ceux qui s’élèvent aujourd’hui contre ce qu’ils considèrent comme une ingérence inacceptable de la part des pays occidentaux dans les affaires intérieures de la Tunisie et une atteinte à sa souveraineté semblent perdre de vue qu’il y a peu de chances de voir un plan de sauvetage de l’économie tunisienne se mettre en place dans une situation d’animosité avec l’Europe et les Etats-Unis d’Amérique. (Illustration : le nationalisme étriqué, conjugué au culte de la personnalité, peut mener à de graves dérapages).
Par Elyes Kasri *
Il est quand même inquiétant de voir deux phénomènes déchaîner les passions et même une certaine hargne en Tunisie contre tout ce qui a trait à la démocratie et à l’Europe et aux Etats Unis d’Amérique.
Par un étrange concours de circonstances et un amalgame proprement tunisien, le parti islamiste Ennahdha semble en dépit de tout associé à la démocratie balbutiante dont certains veulent empêcher le retour quitte à cautionner un régime aux relents apparemment présidentialistes, selon certains experts, plus verrouillé, tout du moins dans les textes, en attendant de voir la pratique, que du temps de feu Ben Ali, période pourtant considérée comme une dictature impopulaire et honnie.
La responsabilité des Tunisiens
Beaucoup, y compris certains responsables, semblent perdre de vue qu’il y a peu de chances de voir un plan de sauvetage de l’économie tunisienne dans une situation d’animosité avec l’Europe et les Etats-Unis d’Amérique.
Ceux qui invoquent la souveraineté nationale gagneraient à prendre conscience de la gravité de la situation de l’économie tunisienne et de la responsabilité des Tunisiens, toutes catégories confondues, dans ce marasme économique malgré la manne financière considérable dont a bénéficié la Tunisie depuis 2011 et qui a été dilapidée dans une euphorie revendicatrice et dépensière collective.
Les responsables tunisiens ont longtemps utilisé le slogan de «la Tunisie, berceau du printemps arabe» et «invest in democracy». Les Européens et les Américains se considèrent en droit de les prendre au mot.
Un nationalisme étriqué
D’autre part, ceux qui par expédient politique ravivent les flammes d’un nationalisme étriqué, devraient sérieusement méditer l’incendie qui risque d’échapper à tout contrôle et le précédent regrettable de l’attaque contre l’ambassade américaine à Tunis un certain 14 septembre 2012.
Ceux qui prônent la défiance et l’autarcie devraient avoir l’honnêteté de présenter un plan de sortie de crise convaincant et préservant la souveraineté nationale telle qu’ils la conçoivent. Ce serait tant mieux s’ils pouvaient le faire avec suffisamment de gages de succès car il vaut toujours mieux compter sur soi-même que sur les autres.
Ancien ambassadeur.
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