Il semble que Néjib Chebbi est le leader du mouvement né de l’alliance de circonstance entre la confrérie des Frères musulmans et sa représentation en Tunisie, Ennahdha, certains anciens soutiens de Nabil Karoui, et les restes de la famille autoproclamée centriste progressiste qui ne sait plus où se donner la tête contre son altesse présidentielle, le calife Kaïs Saïed.
Par Meriem Bouchoucha *
18 octobre 2005 : Néjib Chebbi entre en alliance avec les islamistes contre le régime en place. A l’époque, et vu les circonstances de l’époque, on pouvait prétendre qu’on n’en savait pas assez sur les islamistes. Qui sait ? Peut- être que, finalement, le régime les accusait de crimes qu’ils n’ont pas commis.
Six ans après, le régime a chuté et on s’est tous rendu compte qu’exception faites des pratiques barbares du régime dans ses postes de police et ses prisons, qui étaient une réalité irréfutable, tout ce qu’on a pu dire sur les islamistes n’était que la pure vérité : des réactionnaires qui n’ont aucun scrupule à avoir recours au terrorisme à chaque fois qu’ils sont acculés, leur allégeance est uniquement pour la confrérie et ses branches, et qui sont soutenus dans le but de détruire l’économie avant de passer à la dislocation de la société. Pour faire court, ils sont les traitres de la nation.
Quand aux pratiques barbares du régime, elles continuent dans l’impunité la plus totale et passent sous silence. On continue à enterrer des détenus suite à des prétendus crises cardiaques, suicides ou consommations de substances dangereuses, les mêmes causes avancées, à l’époque, par le régime de Ben Ali.
Cette expérience aurait dû être pour Chebbi et plus que quiconque la dernière. En effet, Chebbi avait ouvert les portes du Parti démocratique progressiste (PDP) aux islamistes car leur parti était prohibé -à raison puisque c’était un parti religieux- au nom des libertés.
Juste avant les élections de 2011, tous les islamistes sont allés rejoindre les rangs de leur confrérie abandonnant le PDP, devenu une coquille vide, et le laissant faire face seul à une défaite cuisante.
Jusque-là disons que le régime de Ben Ali était responsable de ce charabia politique qui a mélangé choux et carottes. Passons…
23 octobre 2012 : l’Assemblée nationale constituante arrive à terme de son mandat. Le pays est gouverné par un président non élu au suffrage universel (Moncef Marzouki), par un gouvernement constitué des islamistes et des partis qui ont trahi leurs promesses à leurs électeurs et par une constituante dont la vice-présidente (feue Maherzia Labidi) nous a dit que l’échéance d’une année n’était qu’un engagement moral (qui n’engageait donc que ceux qui n’ont aucune morale).
Les citoyens qui revendiquaient des élections voulaient lancer un mouvement de protestation contre ce régime de l’assemblée qui s’est installé.
Néjib Chebbi, Samia Abbou et d’autres obligés se sont chargés de plaider en faveur de cette assemblée qui finalement est restée deux années de plus que son mandat. Trois ans ont suffi pour que les islamistes infiltrent toutes les administrations et installent le tissu terroriste chargé d’être leur bras armé. On y a laissé des dizaines de martyrs et on a failli perdre Ben Guerdane. Pis, on a hérité d’un tissu associatif nauséabond qui ne dérange ni les centristes progressistes pro-islamistes ni le calife, son altesse républicaine Kaïs Saïed.
15 octobre 2022 : après qu’ils aient fait leurs preuves en termes de terrorisme, de clientélisme, de corruption, d’incompétence et de connivence avec l’étranger, les islamistes devaient se faire oublier un moment et ils ont besoin d’un «militant» pour les représenter.
Devinez qui se propose pour la mission ? Maître Chebbi, comme à chaque fois. Il cautionne les islamistes, cautionne l’éparpillement de tout mouvement structuré non-islamiste et participe aussi activement que possible à l’affaiblissement de toute construction républicaine qui gagnerait à être entourée pour l’empêcher de toute dérive réactionnaire ou totalitaire.
Difficile de croire que pour Néjib Chebbi, le 18-Octobre n’était qu’une alliance de circonstances.
Ceci étant, il faut savoir que les Tunisiens ne choisiront pas entre deux camps antirépublicains et aussi incompétents l’un que l’autre, Kaïs Saïed le populiste et Néjib Chebbi le funambule et ses acolytes ne peuvent représenter les valeurs de la Tunisie, ce beau pays éternellement en avance sur son époque. Les Tunisiens réussiront à trouver une troisième voie porteuse d’espoir.
Cette bataille est peut-être la dernière avant l’instauration de l’Etat de droit, une autre bataille tout aussi importante devra la précéder pour lui paver la route, celle contre l’impunité, et notamment celle des forces civiles armées et des juges.
En tout état de cause, la bataille contre les islamistes et les populistes est inéluctable et les Tunisiens sont condamnés à la gagner.
Il ne faut jamais sous-estimer une grande nation. Les grandes nations tardent à se révolter car elles sont ancrées dans la civilité mais une fois acculées, leurs révoltes sont dévastatrices pour le pouvoir à déraciner, jamais pour leur pays et c’est à cela qu’on reconnaît une grande nation.
* Docteure en économie.
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