L’Union générale tunisienne du travail (UGTT) continue d’œuvrer en vue d’un dialogue national qui mette fin à la tension actuelle dans le pays et ouvre la voie à l’élaboration d’un plan national de sauvetage, tout en évitant toute confrontation avec le pouvoir, incarné par le président de la république Kaïs Saïed. La centrale syndicale marche sur des œufs dans un atmosphère tendue et volatile.
Par Imed Bahri
L’instabilité politique dans le pays depuis 2011 et la succession de gouvernements sans véritable traitement des revendications de la révolution, à savoir l’emploi, la liberté et la dignité, sont le vrai problème, a déclaré, samedi 7 janvier 2023, le secrétaire général adjoint de l’UGTT, Sami Tahri.
S’exprimant en marge de la conférence régionale des cadres de l’union régionale du travail de Siliana, Tahri a rappelé que la dernière déclaration du bureau exécutif avait mis en lumière la situation générale explosive dans le pays, ajoutant que les réunions locales en cours dans les différents gouvernorats seront couronnées par un grand meeting, le 14 janvier, à Tunis, date du 12e anniversaire de la révolution.
Un plan concerté pour surmonter la crise
Sur les dernières augmentations salariales de la fonction publique, Tahri a déclaré qu’elles ne répondaient pas aux aspirations surtout après la hausse des prix de divers produits et une inflation qui a atteint 10,2% avec une prévision de 11% au deuxième trimestre 2023. La solution est d’engager un dialogue national avec des partenaires pour élaborer un plan permettant de surmonter cette crise, a-t-il estimé.
Le secrétaire général adjoint de l’UGTT, Monem Amira, a souligné, de son côté, la nécessité d’accélérer les démarches concernant cette initiative de dialogue national lancée par l’organisation syndicale pour sortir le pays de la crise, ajoutant qu’elle est actuellement au stade des premières consultations. «La situation dans le pays ne permet aucun retard», a-t-il déclaré aux journalistes, samedi, en marge d’une réunion syndicale à Monastir. D’autant que, selon lui, la crise économique actuelle, en particulier les hausses exorbitantes de prix, a durement frappé le pouvoir d’achat de la classe ouvrière.
L’initiative, qui regroupe l’UGTT, l’Ordre des avocats et la Ligue tunisienne des droits de l’homme, portera sur la situation générale du pays, ainsi que sur les questions économiques, sociales et culturelles. Ses initiateurs ne comptent pas, du moins pour le moment, l’ouvrir aux partis politiques, et ce pour deux principales raisons : un, ces partis sont très divisés et leur participation pourrait faire capoter l’opération; deux, le but est d’associer le président Saïed au processus de manière à assurer la continuité et la légitimité requises pour un plan de sauvetage qui doit recueillir un consensus maximum pour réussir.
En attendant la réponse du patronat
Pour le secrétaire général adjoint Slaheddine Selmi, cette initiative reste ouverte à toutes les organisations nationales, ajoutant que «l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat a été sollicitée pour s’y joindre, mais nous n’avons pas eu de réponse à ce sujet».
Selmi a déclaré que le meeting de Tunis du 14 janvier sera manqué par un discours du secrétaire général Noureddine Taboubi, tout en niant toute intention d’organiser des manifestations de rue, traduisant ainsi la volonté de la centrale syndicale d’œuvrer en vue d’un dialogue national qui mette fin à, la tension actuelle et ouvre la voie à l’élaboration d’un plan national de sauvetage, tout en évitant toute confrontation avec le pouvoir, incarné par le président de la république Kaïs Saïed, même si ce dernier continue de mettre en œuvre son projet politique personnel, tout en restant sourd aux récriminations des partis politiques, des organisations nationales et des représentants de la société civile, qui redoutent l’aggravation de la crise socio-économique sur un fond de blocage politique.
Si les dirigeants de l’UGTT cherchent à éviter toute confrontation, c’est en ayant à l’esprit les précédents épisodes, notamment celui du 26 janvier 1978 (le fameux «Jeudi noir»), qui a dégénéré en un bain de sang, des procès des principaux leaders syndicaux et une longue traversée du désert dont la classe ouvrière a payé le lourd tribut.
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