‘‘La religion juive et sa position envers les non-juifs’’: de l’extermination des Palestiniens à Gaza

Et si le régime et les pratiques coloniales de l’Etat Israélien, qui entretiennent la guerre et empêchent la reconnaissance des droits du peuple palestinien ainsi que le respect de la légalité internationale, ont pour origine l’idéologie ségrégationniste qui est largement diffusée dans sa population grâce à l’enseignement dans sa version la plus sectaire et obscurantiste d’une religion juive censée être à l’origine des préceptes moraux universels.

Par Dr Mounir Hanablia *

Ce livre de l’universitaire israélien Israël Shahak, juif d’origine polonaise, antisioniste militant pour la défense des droits des Palestiniens, honni en Israël et qui a lui-même été accusé d’antisionisme et de haine de soi, sort de l’ordinaire parce qu’il traite de sujets tabous dans son pays et ailleurs, en particulier dans le monde occidental. On découvre ainsi que les préceptes éthiques et moraux universels attribués à l’enseignement de Moïse n’en constituent nullement le fondement.

En réalité, le cœur du judaïsme est composé de l’enseignement et des élucubrations de rabbins à travers les âges et que l’on connaît sous le nom de Talmud. Sa substance en est la supériorité innée du juif, et sa manifestation est constituée par des pratiques ségrégationnistes.

Deux principaux commentateurs se distinguent : le médecin et philosophe Ibn Maimoun le Cordouan, connu sous le nom de Maimonides, contemporain au XIIe siècle de Salah Eddin El Ayoubi et de Abou Yacoub Youssef l’Almohade, auteur de la Mishna Torah; et Yossef Karo, qui au XVIe siècle, écrivit le Choulhan Ha Roukh.

On ne peut évidemment développer d’une manière exhaustive leurs idées. On se bornera à en évoquer quelques passages : un médecin juif ne doit pas traiter un patient non-juif durant le Sabbat, sauf si son abstention peut être dommageable pour sa communauté. Dans ce cas, il doit se faire rémunérer. Il en est de même pour la sage-femme.

«Le meilleur des goyim, tuez-le !»

Concernant la vie humaine, elle est sacrée et l’homicide constitue l’un des péchés capitaux… quand la victime est juive. Quand elle ne l’est pas ce n’est qu’une erreur pardonnable. Si le meurtre d’un non juif est une faute, l’abstention n’en est pas une; par exemple si un non juif tombe dans un puit et qu’un juif passe à proximité, il n’y a aucune obligation pour lui de lui apporter une échelle pour l’en sortir… sauf si évidemment il peut en résulter un dommage pour sa communauté.

On comprend mieux dès lors la mansuétude dont bénéficient les soldats israéliens dans les territoires occupés. En 1956 à Kafr Kassem, un soldat assassina cinquante Palestiniens. Il finit par être relâché après quelques semaines de détention, et au début des années 70, il devint même une personnalité importante de l’agence juive.

Un échange de correspondance entre le Rabbin Shimon Weiss et un soldat israélien demeure à cet égard significatif: le Rabbin y rappelle une maxime du Talmud : «Le meilleur des goyim (non-juif, Ndlr), tuez-le ! Le meilleur des serpents, écrasez-lui la tête.» Et il explique qu’il est du devoir en temps de guerre de tout soldat juif de tuer tout non-juif qui pourrait constituer une menace pour la vie des juifs, c’est-à-dire que lui seul jugerait menaçant; le soldat en conclut qu’il est dès lors pour lui licite de tirer sur les vieillards, les femmes et les enfants palestiniens, même si en agissant ainsi il désobéit aux ordres.

Dès lors, les actuels bombardements israéliens contre la ville de Gaza prennent un tout autre relief. Le gouvernement israélien semble ainsi adopter une politique non pas issue du droit International, celle de se défendre, mais du Talmud, celle d’exterminer d’une manière préventive les populations civiles qui pourraient abriter des résistants.

L’hostilité des Israéliens vis-à-vis des Palestiniens n’est par ailleurs pas uniquement dictée par le Talmud, ni par les aléas d’un conflit colonial. Elle est en réalité inscrite dans la mémoire des juifs Ashkénaze originaires de Pologne et d’Ukraine qui, employés au XVIIe siècle par les seigneurs polonais en tant que contremaîtres, métayers, et percepteurs d’impôts, nourrissaient un profond mépris pour tous les paysans sur lesquels ils exerçaient leur autorité, et leurs descendants en Israël l’ont transposé sur les Palestiniens. Ce sont d’ailleurs ces paysans-là qui lors des révoltes de Bogdan Chmielnicki et de Pougatchev, avaient massacré les juifs dans de véritables pogromes, mais cela n’avait été le résultat que de la position socioéconomique que ces derniers occupaient dans l’exploitation dont ils étaient les victimes.

La supposée hostilité universelle contre les juifs

Ceci renvoie évidemment à la supposée hostilité universelle contre les juifs dont les sionistes se servent pour justifier l’établissement d’un foyer national juif. En réalité, dans l’Europe chrétienne, ils furent toujours protégés par les Rois et les Seigneurs qu’ils servaient. Et lorsqu’on dit protéger, cela concerne les rabbins qui exerçaient une autorité sur leur communauté, souvent un véritable droit de vie ou de mort, avec la caution de l’Etat. Les rabbins maintinrent leurs ouailles dans un état épouvantable de misère et d’ignorance, en leur interdisant de fréquenter les écoles publiques. Ils leur interdirent les livres des pays dans lesquels ils vivaient, ou l’apprentissage des langues, et les seuls ouvrages qu’ils lisaient en hébreu quand ils avaient appris à lire étaient des commentaires de la Torah ou du Talmud. Les contrevenants étaient punis, soit par des taxes, dont l’État ou le seigneur récupérait une partie, soit par des châtiments corporels qui pouvaient aller jusqu’à la mort dans le cas d’hérésie.

Au XIVe siècle le Roi de Castille Pierre le Cruel permit ainsi aux chefs de ses communautés juives de constituer une véritable inquisition chargée de surveiller leurs ouailles, et qui servit certainement de modèle à celle que les rois catholiques établiraient plus tard. Mais ce fut toujours lorsque les privilèges des puissants et des nobles étaient menacés ou remis en question par l’ascension sociale des classes inférieures, et l’émergence du sentiment nationaliste et des revendications égalitaires, que les juifs furent particulièrement menacés en Europe. Et il faut reconnaître qu’ils auraient pourtant eu de bonnes raisons de susciter l’hostilité des chrétiens, puisqu’ils ne manquaient jamais, dans leurs imprécations contre Jésus, de souhaiter la disparition de son nom et l’annihilation de son souvenir.

Néanmoins les rabbins considèrent toujours les chrétiens comme des polythéistes, ce qui, compte tenu d’un rituel célébrant par une partie au moins des fidèles, ceux qu’on qualifie de Hassidiques, l’accouplement d’êtres chimériques, ne laisse pas d’étonner. S’ils interdisent désormais de les tuer, c’est uniquement parce qu’ils ne veulent pas susciter leur hostilité, alors qu’Israël a besoin d’eux.

Les actes antichrétiens ne sont cependant pas rares, et il y a environ un mois des missionnaires chrétiens à Jérusalem ont été entourés par des enfants juifs les conspuant, et une procession portant la croix a fait l’objet de crachats de la part de certains religieux.

En 1980, plusieurs exemplaires du Nouveau Testament furent publiquement brûlés. Mais l’hostilité fondamentale des textes envers les non-juifs est toujours soigneusement dissimulée, et si les expressions les plus scandaleuses de l’Ancien Testament sont aujourd’hui publiées en Israël dans les versions en Hébreu, ou bien exprimées en Araméen, une langue disparue que peu de juifs comprennent, elles sont connues du public israélien, en étant soigneusement édulcorées dans les versions en langues étrangères, soit par des traductions inexactes, ou bien en conférant aux mots laissés tels quels un sens qui n’est pas le leur à l’origine en Hébreu. Ainsi en est-il du mot Kashite, qui désigne en réalité les Noirs, et pas de la meilleure manière qui soit. Mais naturellement une conspiration générale du silence empêche ces réalités là d’être diffusées, et tous ceux qui en font état sont accusés soit d’antisémitisme, soit de haine de soi.

L’antisémitisme ou l’invention d’une supposée race juive

Il serait trop fastidieux d’énumérer ici toutes les manifestations de la ségrégation rituelle, autant dans la pratique de l’intérêt que dans les relations sexuelles. Il faut rappeler que c’est au XIXe siècle depuis Napoléon Bonaparte que les juifs ont commencé à s’émanciper de l’obscurantisme de leurs rabbins en acquérant en Europe la pleine citoyenneté. Et c’est depuis lors que l’antisémitisme a commencé à se développer avec l’invention d’une notion, celle d’une supposée race juive. Cela n’a pas empêché plusieurs parmi eux de vivre en bonne entente avec les courants les plus conservateurs et les plus xénophobes de la société.

Ainsi Martin Buber, le célèbre penseur qui prônait un sionisme spirituel, et critiquait le nazisme, n’en admirait pas moins la promotion de la pureté raciale qui correspondait exactement à l’idéal du Talmud, celui de la séparation des juifs et des non-juifs. Et les sionistes se sont toujours entendus avec les antisémites parce qu’il était de leur intérêt de pousser les juifs à l’émigration.

Il n’y a donc rien d’étonnant si aujourd’hui lors de la guerre de Gaza, les supporters d’Israël soient en Europe Occidentale, et en Inde, les franges les plus racistes et les plus exclusives de la société, et si Israël veut faire passer le combat du peuple palestinien comme une manifestation du jihad mondial, contre l’ensemble des nations.

Il est important de rappeler aujourd’hui que les musulmans et les juifs ont souvent vécu en bonne intelligence, parce que les régimes politiques musulmans, en particulier l’empire Ottoman, furent minoritaires, autoritaires et répressifs, et que les juifs y remplirent tout comme en Europe une fonction socio-économique particulière au bénéfice des pouvoirs en place.

Il n’est pas opportun de jeter l’opprobre sur l’ensemble des fidèles d’une religion à cause de la présence dans ses rangs de fanatiques haineux et sectaires capables d’influer sur la politique d’un Etat, ou de préceptes épouvantables remontant à la nuit des temps et qui continuent d’être enseignés dans des écoles obscurantistes comme c’est le cas aujourd’hui aussi bien en Israël qu’au Pakistan. Les sionistes ont même réussi à reporter contre les musulmans en Occident tous les reproches et les préjugés dont  les juifs étaient jadis les victimes parmi la populace européenne. Mais si quelques-uns parmi eux prient effectivement des créatures démoniaques, on ne peut nier qu’un grand nombre de fidèles partagent les mêmes valeurs morales et prient le même Dieu que les chrétiens et les musulmans; ou plus simplement n’éprouvent pas le besoin d’y croire. 

Néanmoins on ne peut plus ignorer que le régime et les pratiques coloniales de l’Etat Israélien qui entretiennent la guerre et empêchent la reconnaissance des droits du peuple palestinien ainsi que le respect de la légalité internationale, ont pour origine l’idéologie ségrégationniste qui est largement diffusée dans sa population grâce à l’enseignement dans sa version la plus sectaire et obscurantiste d’une religion censée être à l’origine des préceptes moraux universels.

* Médecin de libre pratique.

‘‘La religion juive et sa position envers les non- juifs’’ de Israël Shahak, traduit à l’arabe par Hassen Khidr, 182 pages, 22 mai 2017.

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