Dans cette lettre ouverte à l’ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie intitulée «Oui à la coopération, non au double discours», le bureau directeur de l’Association d’éducation relative à l’environnement (Aere-Hammamet), exprime son refus du double langage de l’UE qui, d’un côté œuvre pour que la Méditerranée soit un espace de dialogue, de solidarité, de paix et de coopération, et de l’autre côté, soutient l’opération de destruction systématique de Gaza par l’armée israélienne. (Illustration: Israël Katz, ministre des Affaires étrangères d’Israël et Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité – Ph. UE).
Monsieur l’Ambassadeur,
L’Union européenne (UE) a lancé en décembre 2023 le premier appel à propositions du programme «Interreg Next Med» qui dispose d’un budget de 103 millions d’euros afin de financer des projets de coopération pour une région méditerranéenne «plus intelligente, plus verte et plus inclusive».
Plusieurs entités tunisiennes (institutions, collectivités locales, organisations, associations, ONGs…) ont été conviées à une journée d’information qui se tiendra prochainement à Tunis afin de leur permettre d’en savoir davantage sur le programme et de les encourager à prendre part à l’appel à propositions.
Monsieur l’Ambassadeur,
Nous sommes conscients et convaincus de l’importance de ce programme de coopération transfrontalière pour l’édification d’un espace méditerranéen pacifié, solidaire et durable. Nous avons même participé activement à plusieurs projets financés par ce programme.
Ceci étant dit, nous déplorons vivement la position de l’UE face aux drames inhumains, aux crimes abominables et aux malheurs indescriptibles que fait subir, depuis octobre 2023, l’armée israélienne aux Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie. L’UE a choisi de se ranger du côté du NON-DROIT faisant fi des règles du droit international, du droit humanitaire et de la légalité internationale. Depuis le 7 octobre, les pays européens nous servent en boucle le mantra éculé, ressassé, rabâché selon lequel «Israël a le droit de se défendre» ne se souciant que de certaines victimes et se désintéressant des autres comme s’il fallait faire un tri parmi les victimes.
Comment ne pas être scandalisé par une telle attitude de l’UE qui vient en même temps nous louer les vertus de la coopération méditerranéenne? Comment ne pas y voir un comportement hypocrite voire schizophrène? Cette position a sapé notre moral et refroidi notre enthousiasme pour le programme «Next Med».
Monsieur l’Ambassadeur,
Nous vous prions de bien vouloir relayer auprès de votre hiérarchie notre étonnement devant votre silence complice et le peu de cas que vous réservez au caractère sacré de la vie humaine. Le monde entier hurle sa solidarité avec les enfants palestiniens tués de sang-froid, et l’UE est insensible et indifférente à ces drames. Se peut-il qu’elle soit devenue aveugle? Les dirigeants européens ne voient-ils pas leurs propres enfants dans les yeux terrorisés de ces petits Palestiniens massacrés par milliers? Il est alors grand temps qu’ils ôtent les œillères et regardent la réalité en face.
Monsieur l’Ambassadeur,
Le Hamas n’est pas notre genre de beauté, ni le modèle de démocratie auquel nous aspirons. Et plus généralement, ni les islamistes, ni les sionistes ne nous conviennent. Mais un crime ne justifie pas un autre crime cent fois plus grand. Seuls les appels au cessez-le feu immédiat, à la paix, la fraternité et la coexistence entre Palestiniens et Israéliens feraient taire les va-t-en guerre.
L’UE a malheureusement choisi le camp de l’occupant contre l’occupé, du colon contre le colonisé, du puissant contre le faible, du marteau-pilon contre la mouche. Et si les choses restent en l’état, Israël, le dernier né du couple vieillissant Etats-Unis – Europe, l’enfant gâté laissé sans surveillance finira par entraîner la région et le monde entier vers une confrontation généralisée. Nous serions alors à mille lieues des objectifs du programme européen «Next Med» dont on voudrait faire la promotion.
En nous excusant d’avance d’avoir abusé de votre patience, nous vous adressons, M. l’Ambassadeur, nos salutations les plus cordiales.
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