Le maire travailliste de Londres Sadiq Khan, musulman et d’origine pakistanaise, est devenu le bouc émissaire du lobby sioniste au Royaume-Uni. Des responsables politiques et des médias s’acharnent sur lui depuis le début de la guerre israélienne sur Gaza le 7 octobre 2023 et à mesure que la guerre se prolonge et que la mobilisation dans les rues de Londres contre la guerre s’intensifie, l’acharnement s’intensifie aussi.
Par Imed Bahri
C’est une violente campagne raciste et islamophobe qui cible Sadiq Khan, maire de Londres depuis 2016, mais c’est encore plus pernicieux car en sourdine il y a un communautarisme de hauts responsables d’origine indienne qui sont puissants dans le parti conservateur rival. Ces derniers soutiennent indéfectiblement Israël et considèrent les manifestants pro-palestiniens qui défilent tous les samedis à Londres comme de dangereux agitateurs, des antisémites et même des islamistes. M. Khan pointe du doigt le chef du gouvernement Rishi Sunak.
Dans une interview à la chaîne pakistanaise Geo TV et relayée par Geo News, le média en ligne de la chaîne, dans laquelle il est revenu sur cette campagne qui commence à beaucoup l’agacer, il a notamment déclaré que des attaques racistes et islamophobes avaient été lancées contre lui avec le soutien du Premier ministre Rishi Sunak (d’origine indienne et de confession hindoue) par les plus hauts dirigeants conservateurs parce qu’il était musulman d’origine pakistanaise. Il considère qu’il n’y a aucun doute sur les raisons pour lesquelles des allégations fausses et dangereuses avaient été formulées contre lui et contre les musulmans britanniques par des conservateurs de haut rang tels que Suella Braverman, Lee Anderson, Lizz Truss (très brièvement cheffe de gouvernement en 2022) et d’autres.
L’islamophobie gagne du terrain
Suella Braverman, ex-ministre de l’Intérieur, elle aussi d’origine indienne et mariée à l’Israélo-britannique Rael Braverman et qui figure parmi les plus ardents défenseurs d’Israël au Royaume-Uni, était notamment entrée en conflit avec la Metropolitan Police de Londres car cette dernière avait refusé ses demandes d’interdire les manifestations propalestiniennes. Elle s’en prend régulièrement aux manifestants qu’elle considère comme de dangereux extrémistes.
Quant au député Lee Anderson, ancien vice-président du parti conservateur, il est allé jusqu’à affirmer que Khan était contrôlé par les islamistes et Suella Braverman a affirmé que la Grande-Bretagne était dirigée par les islamistes. Khan a déclaré à Geo TV: «Il est très regrettable que le parti conservateur amplifie les théories du complot selon lesquelles je suis contrôlé par les islamistes. Ces allégations sont des mensonges et des insultes à l’égard des musulmans.»
Khan avait exhorté le Premier ministre de qualifier ces propos de racistes et d’islamophobes mais Sunak a refusé de le faire. Il a déclaré que le Premier ministre et son cabinet auraient dû déclarer que ces commentaires des dirigeants conservateurs sont racistes, islamophobes et antimusulmans mais ils ont peur.
Le maire de Londres a déclaré dans cette même interview: «Je peux vous dire que si je n’étais pas Pakistanais et musulman, ces allégations n’auraient jamais été faites. Il est très dangereux et totalement faux de dire qu’il y a une islamisation de Londres, que les musulmans s’emparent de Londres et que Londres est devenue le Londonistan. Ces allégations visent à susciter la peur à l’égard des musulmans au sein des communautés non musulmanes. Le fait est que les musulmans se sont intégrés dans la société, nous avons appris la langue, nous fréquentons les écoles et les universités pour nous former, nous travaillons et nous payons des impôts. On se demande alors ce qu’il faudra pour que nous soyons acceptés?» Il poursuit: «Lorsqu’il y a un incident d’antisémitisme, nous disons que c’est mauvais et antisémite. Nous condamnons également la misogynie et le sexisme. Alors pourquoi est-ce que lorsque des Britanniques et des musulmans d’origine pakistanaise sont attaqués, personne ne dit que c’est islamophobe et antimusulman?».
Khan a déclaré que cela faisait plus d’une semaine qu’Anderson avait fait des commentaires islamophobes, mais que l’ensemble du gouvernement avait refusé de prononcer le mot «islamophobe». «Même si vous avez un problème avec le mot islamophobe, vous pouvez dire que c’est antimusulman. C’est très regrettable car Rishi Sunak devrait être mieux informé», a-t-il déclaré, exhortant le Premier ministre à cesser de discriminer les musulmans et les Pakistanais.
La politique de la peur et de la haine
Concernant Braverman, le maire de Londres a déclaré: «Suella Braverman dit que la Grande-Bretagne a été prise par les islamistes. Je lui demande comment et où? À la Chambre des Lords, à la Cour suprême, à la Chambre des communes ou dans les médias, comment et où?… Nous devons organiser un registre et un vote car ces attaques sont lancées pour nous dissuader de participer aux votes. Pour les musulmans, il est plus important que jamais de participer à la politique.»
M. Khan qui brigue en mai prochain un troisième mandat à la tête de la capitale britannique rappelle qu’il a été la cible d’une violente campagne raciste et islamophobe en 2016 par les Conservateurs et son adversaire de l’époque Zac Goldsmith et déclare: «Ma crainte est que la même chose se reproduise parce que les élections locales de mai approchent à grands pas et que les conservateurs recommencent pour effrayer les électeurs en leur disant que Sadiq Khan est musulman et pakistanais. L’année prochaine, il y aura des élections générales et ils projettent des mensonges et de l’islamophobie pour gagner des voix sur la base de la peur et de la haine.»
Le dernier sondage YouGov donne à Sadiq Khan 25 points d’avance sur son rival conservateur mais il a déclaré que les sondages ne le dérangeaient pas et estimait que la seule façon d’avancer était qu’un maximum de personnes se manifestent et votent.
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