Enlèvement avorté du journaliste algérien Hichem Aboud en Espagne

Le journaliste algérien Hichem Aboud, connu pour ses critiques acerbes envers le régime algérien, a été victime d’une tentative d’enlèvement à son arrivée à Barcelone, en Espagne, dans la nuit du jeudi 17 octobre 2024. L’intervention rapide de la Guardia Civil espagnole a permis de le sauver de justesse, alors qu’il était sur le point d’être embarqué de force probablement vers l’Algérie. A moins que ce ne soit un scénario monté de toutes pièces par le journaliste avec les services marocains, comme on le susurre à Alger.

Djamal Guettala

Hichem Aboud a été enlevé par quatre hommes armés et cagoulés à quelques mètres de sa résidence. Les ravisseurs l’ont violemment forcé à monter dans une voiture sans plaque d’immatriculation, qui a pris la direction de Malaga à vive allure. «Ils semblaient suivre des ordres précis», a déclaré Aboud, encore sous le choc après cet épisode traumatisant.

Le journaliste a passé la nuit, le visage recouvert d’une cagoule, craignant un rapatriement forcé en Algérie où il redoutait des représailles. Connu pour ses dénonciations des dérives du régime algérien, il pensait que les services secrets algériens étaient impliqués dans cette opération criminelle.

Le calvaire d’Aboud a pris fin près de Lebrija, à environ 50 kilomètres de Séville, où les ravisseurs tentaient de l’embarquer sur un bateau. C’est à ce moment qu’un escadron de la Guardia Civil est intervenu, forçant les ravisseurs à s’enfuir. Deux d’entre eux, un Sénégalais et un Maghrébin, ont été arrêtés sur place.

Hichem Aboud a exprimé sa profonde reconnaissance envers les forces de l’ordre espagnoles : «Je n’ai pas de mots pour exprimer ma gratitude à la Guardia Civil. Ils m’ont sauvé d’une situation inimaginable.» Le journaliste a ensuite été conduit à l’hôpital de la ville pour recevoir les soins nécessaires.

Les premiers éléments de l’enquête pointent vers une collaboration entre une organisation terroriste opérant dans le sud de l’Espagne et les services secrets algériens. Une affaire qui fait grand bruit et soulève de nombreuses questions sur l’implication d’un État dans une telle opération sur le sol européen.

L’avocat de Hichem Aboud, Essakali Abdeljalil, a annoncé qu’il interviendrait prochainement auprès du gouvernement espagnol pour dénoncer cette tentative d’enlèvement orchestrée par des agents au service du régime algérien.

La rédaction d’Atalayar, où travaille Hichem Aboud, a exprimé sa solidarité et se réjouit du dénouement heureux de cette affaire. Cependant, cette tentative d’enlèvement, impliquant des acteurs internationaux, marque un tournant inquiétant pour la liberté de la presse et la sécurité des journalistes.

Le journaliste dissident est l’auteur d’un essai intitulé La Mafia des généraux, paru en 2002, aux éditions JC Lattès en France, où il révèle la part d’ombre de l’armée algérienne, les dix ans de guerre civile, les centaines de milliers de victimes, et les milliards détournés qui, selon lui, font la réalité de l’Algérie d’aujourd’hui. Il parle notamment d’un «cabinet noir» qui, par le crime et la corruption, puis la terreur, a assis son pouvoir sans partage sur les institutions, l’économie, les hommes, tout en manipulant jusqu’à ses ennemis supposés.

Hichem Aboud, né le 15 juin 1955  est fondateur et ancien directeur de plusieurs journaux en Algérie. Il eut maille à partir avec la justice et fut poursuivi pour des délits de presse, notamment par des généraux algériens. Il réussit à quitter le pays en février 1997 et continue de publier des enquêtes sur le régime algérien. En mai 2023, il est condamné à dix ans de prison pour «diffamation et atteinte à la sécurité nationale» et il fait l’objet d’un mandat d’arrêt international.

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