Tunisie l La montée des protestations face au déni des autorités

Dans cet article traduit de l’arabe, l’auteur tire la sonnette d’alarme : la politique consistant à fuir les problèmes, par la procrastination ou la rhétorique publique non suivie d’actions concrètes, risque d’aggraver le mécontentement dans une Tunisie où le coût de la gestion des crises augmente et les possibilités de lendiguement des colères diminuent.

Fahem Boukaddous *

Le pays est le théâtre, ce matin, jeudi 25 décembre 2025, de mouvements de protestation simultanés à Tunis, Gabès (photo) et Redeyef, témoignant de la montée des tensions sociales et environnementales.

Dans la capitale, des personnels du secteur de l’éducation organisent un sit-in devant le ministère de l’Éducation, une action sans précédent qui rassemble neuf secteurs différents.

Parallèlement, à Gabès, un mouvement écologiste se mobilise pour exiger le démantèlement des usines polluantes, alors que se tenait, en même temps, l’audience du tribunal devant se prononcer sur cette revendication, fondée sur un large mandat populaire.

Dans la capitale, des personnels de l’éducation ont manifesté devant le ministère de l’Éducation, un mouvement exceptionnel qui a rassemblé neuf   corps enseignants.

Parallèlement, à Redeyef, une marche de protestation a été organisée contre la négligence, suite à l’accident d’une infirmière brûlée dans l’exercice de ses fonctions.

L’action syndicale exceptionnelle du secteur de l’éducation, qui a réuni pour la première fois neuf secteurs différents au sein d’un même mouvement, n’aurait pas été possible sans un large mandat sectoriel exprimant une volonté collective au sein du système éducatif.

Ce mandat témoigne de l’ampleur de l’érosion de la confiance dans les réformes annoncées et dans les promesses répétées restées lettre morte. Il révèle également que la crise n’est plus seulement technique ou limitée aux revendications, mais bien structurelle, touchant au cœur même des choix de politiques publiques dans la gestion d’un secteur stratégique comme l’éducation.

À Gabès, le mouvement écologiste dépasse la logique de la protestation traditionnelle pour acquérir une dimension souveraine, puisqu’il repose sur un large mandat populaire de plus de cent mille citoyens, qui exigent explicitement le démantèlement des unités polluantes et la protection du droit à la vie et à un environnement sain.

Ce mandat populaire non seulement légitime le mouvement, mais met également le pouvoir exécutif à l’épreuve en ce qui concerne le respect de la volonté des citoyens et l’engagement envers les exigences de la justice environnementale, au lieu de simplement gérer la crise ou de la repousser.

Ce qui se passe à Redeyef nous rappelle que la négligence accumulée, notamment dans les secteurs de la santé et de l’environnement, n’est plus seulement une défaillance administrative, mais constitue une menace directe pour la sécurité des travailleurs et des citoyens. Cela révèle le lien intrinsèque entre les politiques environnementales, sanitaires et sociales, et dissipe l’illusion que chaque problème peut être traité isolément.

Le danger de la situation actuelle réside non seulement dans l’ampleur des manifestations, mais aussi dans leur caractère nécessaire. Lorsqu’un secteur entier se mobilise et que les citoyens agissent en vertu d’un large mandat populaire, ignorer ou minimiser ce phénomène revient à se déconnecter dangereusement de la réalité.

En persistant dans sa politique consistant à fuir les problèmes, par la procrastination ou une rhétorique publique non suivie d’actions concrètes, le pouvoir exécutif ne fait qu’exacerber le ressentiment et élargir le cercle du rejet.

Le mandat, qu’il soit sectoriel ou populaire, n’est pas simplement un mécanisme organisationnel, mais un message politique clair : la société n’accepte plus la gestion de crise, mais exige des solutions radicales, participatives et responsables.

Toute obstination à ignorer ce message pourrait entraîner le pays sur une voie d’escalade, où le coût de la gestion de la situation augmente et les possibilités d’endiguement diminuent, à un moment où la situation nationale ne peut supporter davantage de déni ou de report.

* Journaliste.

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