L’appel est pathétique et il en dit plus long sur la détresse d’un homme, Hedi Djilani, privé depuis onze ans de l’affection de sa fille, Zohra, épouse de Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ancien président Zine El-Abidine, exilée malgré elle au Canada, que sur la bonté, présumée et espérée, d’un président, Kaïs Saïed, qui n’a pas montré, jusque-là, beaucoup de cœur.
Par Ridha Kéfi
L’appel de détresse a été publié, hier, lundi, 18 juillet 2022, sur son compte Facebook, par l’ancien président de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica) et ancien président de l’Espérance sportive de Tunis (EST), sous forme d’appel à voter «OUI OUI OUI» au projet de constitution proposé par M. Saïed au référendum du 25 juillet.
Nous reproduisons ci-dessous le texte de cet appel, et nous commenterons après :
«2011-2022 :
J’ai tout perdu dans l’injustice la plus totale, alors que je n’ai rien fait de mal, sinon servir mon Pays la Magnifique Tunisie.
25 Juillet 2022 :
Avec le Président Kaïs Saïed, peut-être que j’ai une chance de vivre en paix ainsi que toute ma famille et récupérer ce que j’ai perdu.
Alors je vais voter OUI OUI OUI.»
La souffrance d’un père
On ne risque pas de décevoir M. Djilani, dont nous avons souvent déploré dans ce journal le sort ingrat et injuste qui lui est réservé par les pouvoirs successifs depuis 2011, puisque lui-même a osé accoler un prudent «peut-être» à ses attentes très personnelles – et c’est le cas de le dire – d’un président de la république qui se la joue grand révolutionnaire devant l’Eternel et affiche, tous les jours que Dieu fait, une ostensible haine à tous ceux qui l’ont précédé dans la gestion des affaires du pays.
M. Saïed aura-t-il suffisamment de cœur – ce qu’un président est censé devoir prouver pour gagner les cœurs de ses concitoyens – pour être un tant soit peu sensible à la souffrance d’un père qui, à 74 ans, et retiré depuis onze ans de la vie publique, voudrait avoir la chance, de son vivant, de voir sa fille bien-aimée et ses petits-enfants, fouler de nouveau le sol de leur patrie après un long exil forcé ?
On l’espère sincèrement pour notre ami Hedi Djilani, qui ne mérite pas vraiment les misères qu’on lui inflige au nom d’une pseudo-révolution à laquelle plus personne dans le pays ne croit et dont les seuls «bienfaits», jusque-là, sont l’instabilité politique et la disette économique.
Tout est pour lui, rien pour les autres
Mais, sans vouloir le décevoir, nous lui disons seulement, pour atténuer l’impact d’une éventuelle nouvelle déception, que l’être le plus vertueux ne peut donner que ce qu’il a, et qu’il en faudrait plus que la souffrance d’un père pour émouvoir celui qui se prend, déjà, pour le père de la nation, qui plus est, dans l’effacement de la mémoire de tous ceux qui le furent avant lui. Le «OUI OUI OUI» de M. Djilani sera peut-être utile pour Kaïs Saïed – tout est pour lui et rien pour les autres, depuis un certain 25 juillet 2021 –, mais le sera-t-il pour M. Djilani lui-même ? C’est tout le mal que nous lui souhaitons de tout notre cœur!
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