Le problème de la Tunisie réside dans le fait que tout le monde (ministres, hauts responsables publics, experts indépendants, etc.) fait un bon diagnostic de la situation et sait ce qu’il faut faire pour régler tel ou tel problème, mais pourquoi, bon sang, personne n’a le mode d’emploi des remèdes qu’il préconise ? Quand va-t-on faire face aux problèmes au lieu de les énumérer et de tirer des plans savants sur la comète ? (Illustration : Leila Chikhaoui Mahdaoui).
Par Imed Bahri
Dans un communiqué publié hier, jeudi 18 août 2022, sur la protection des zones forestières contre les incendies et la réduction des pertes économiques, environnementales et sociales qu’ils causent, le ministère de l’Environnement appelle à l’élaboration et à la mise en œuvre des mesures de protection nécessaires pour protéger la richesse forestière, notamment en soutenant la protection des gardes forestiers contre toutes les attaques auxquelles ils sont exposés dans l’exercice de leurs fonctions.
Tout cela est bien charmant
Le ministère appelle aussi à une interdiction absolue de changer la vocation des terres forestières touchées par les incendies en zones agricoles, résidentielles et autres, quels que soient les raisons et les motifs.
Il souligne également la nécessité de renforcer la protection des zones forestières touchées par les incendies pour faciliter et accélérer le processus de leur remise en état et la croissance naturelle des plantes, des arbustes et du couvert végétal qui s’y trouvent.
Le ministère de l’Environnement insiste, par ailleurs, sur la nécessité de renforcer la surveillance continue des zones forestières et des systèmes naturels en coordination avec toutes les parties concernées en utilisant des moyens avancés et modernes, en particulier des drones et des images satellites, en coordination avec le Centre national de cartographie et de télédétection (CNCT).
Dans ce contexte, il préconise l’installation de caméras de surveillance aux entrées des zones forestières et de les relier aux unités de surveillance et aux salles d’opération pour soutenir les mécanismes d’alerte précoce pour toutes les parties concernées.
Il appelle enfin à criminaliser l’utilisation des produits combustibles dans les zones forestières sans contrôle et approbation préalables des autorités de sécurité.
«Y a qu’à… y a qu’à…»
Tout cela est bien charmant, et Mme la ministre de l’Environnement, Leila Chikhaoui Mahdaoui, pourra dormir ce soir sur ses deux oreilles avec le sentiment du devoir accompli. Mais il y a quand même un problème : le ton implorant du communiqué publié par son département traduit l’impuissance de l’administration publique face aux problèmes quotidiens des Tunisiens. Son département se contente, en effet, d’«appeler à…», alors qu’on attend du pouvoir exécutif qu’il agisse dans le sens du respect de la loi et de l’intérêt public.
Pourquoi le ministère de l’Environnement, dont la mission consiste à protéger les ressources naturelles du pays et le cadre de vie des citoyens, ne prend-il pas lui-même les devants, à son niveau, et coordonne des actions concrètes avec les autres départements ministériels concernés (Agriculture, Intérieur, Défense…) pour faire face efficacement aux atteintes à l’environnement, puisqu’il semble connaître ce qu’il faut faire à cet égard ?
Jusqu’à quand nos responsables gouvernementaux vont-ils continuer à brasser du vent en tirant des plans sur la comète, sans mettre la main dans le cambouis ? La Tunisie a besoin de vrais décideurs, et non de technocrates gris qui ne quittent leurs bureaux que pour aller pérorer sur quelque tribune dans un hôtel chic de la banlieue nord de Tunis et répéter «y a qu’à… y a qu’à…»
Tout le monde dans ce pays sait ce qu’il faut faire pour régler tel ou tel problème, mais pourquoi, bon sang, personne n’a le mode d’emploi des remèdes qu’il préconise ?
Le pays roule sur la jante, en continuant à payer de gros salaires à des hauts responsables incompétents et, surtout, incapables d’agir sur le réel…
Quand cette parodie de pouvoir va-t-elle enfin cesser ?
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