Dans un pays devenu fantôme, la Tunisie, il n’y a plus qu’une seule prière, laquelle rappelle le célèbre cri de mort du noir américain George Floyd : «I can’t breathe». Les Tunisiens réclament de leur côté : «Un peu d’air s’il vous plaît monsieur le fort en paroles !».
Par Fathi Bchir *
Je cherchais un exemple pour illustrer le sens d’un mot qui n’est pas d’un usage courant : apnée. L’exemple qui m’est tout de suite venu à l’esprit est celui de la Tunisie. C’est en effet tout un pays qui se retrouve en apnée, le souffle coupé. Qui ne demande qu’une chose, qu’on le laisse respirer et qu’il puisse quitter le fond pour émerger dans un air respirable, de préférence non vicié.
Un pays qui n’est pas loin de toucher le fond
Le pays n’a pas eu d’air frais depuis une dizaine d’années. Le pays ne demande qu’à respirer pour reprendre le travail et la production pour se préparer à la disette et au manque de céréales. Le couscous national est à ce prix. Quel gâchis que ce manque d’air.
L’apnée est, en vrai, un sport où des plongeurs atteignent le fond et puis doivent remonter très vite le long d’un fil conducteur, plutôt une corde.
Et c’est presque l’état de notre pays qui qui n’est pas loin de toucher le fond et aucun fil d’espoir ne permet d’entrevoir une proche remontée vers la surface. Aucun fil n’est proposé même pas une corde, plutôt faite pour pendre.
Un pays suspendu à la décision d’un seul homme
Aujourd’hui, c’est en effet tout un pays qui se retrouve suspendu à la décision d’un seul homme qui n’est pas dieu même pas un «primus inter pares», car jamais réellement légitimé, sauf par un vote fantasque qui tient lieu plus du star system que d’un exercice démocratique concluant un débat de fond sur des choix fondamentaux, institutionnels économiques et sociaux.
Malentendu électoral ? Erreur de jugement ? On pourrait le croire tant les chiffres livrés par les sondages sont astronomiques presque incroyables. Si on avait au moins l’assurance qu’ils sont vrais?
Dans ce pays devenu fantôme et il n’y a plus qu’une seule prière, laquelle rappelle le célèbre «laissez-nous respirer», le cri de mort du noir américain George Floyd : «I can’t breathe».
Toute la Tunisie réclame de son côté : «un peu d’air s’il vous plaît monsieur le fort en paroles».
Il y en a assez de l’apnée. ce n’est plus un exercice amusant. La colère n’est encore que sourde. Ça finira sans doute par gronder. Quand? Demain ou après-demain? Attendre!
* Journaliste tunisien basé à Bruxelles.
Articles du même auteur dans Kapitalis :
Avec le dévoiement des médias, c’est la démocratie qui est le grand perdant
Abir Moussi, le tsunami politique qui dérange
La légitimité d’un leader s’acquiert par le combat contre les nouveaux occupants
Donnez votre avis