Lotfi Bouchnak a clôturé en apothéose le festival de Carthage, jeudi, avec un public qui exultait et reprenait en choeur ses chansons.
Par Hamadi Abassi
Affrontant le temps maussade, les légions de fans du grand ténor Lotfi Bouchnak se pressaient, mardi dernier, aux portillons du théâtre romain pour assister au concert de clôture de la 51e session du Festival de Carthage.
Une affluence considérable pour rencontrer ce grand maitre des envoutants «mouachahs» et des «adouars» à la maitrise complexe. Une grande voix sublime, époustouflante de virtuosité, capable de vous transporter dans des territoires inaccessibles ou de vous immerger dans une béate fascination.
Les amateurs de musique «tarabi» ont été comblé.
La musique «tarabi» portée au zénith
Semblable à un rag-time syncopé, la pluie diluvienne vient rafraichir les enthousiasmes du public, qui a déserté la nef du théâtre romain sous des trombes d’eau d’un ciel déchainé.
Cette contrariété climatique n’a altéré en rien l’enthousiasme du public, qui a promis de revenir assister au gala de sa vedette, reporté par la direction du festival à jeudi.
Ce jour-là, c’est sous une importante surveillance des forces de l’ordre que les fans inconditionnels du chanteur et les amateurs de musique «tarabi», précédant le grand rush, ont occupé dès le début de la soirée, les gradins bruissants et animés. Une foule considérable patientait avide de communier avec le chanteur qui s’est montré ponctuel, en arrivant sur scène vêtu d’une «jebba kamraïa», son luth à la main. Le public exulta, trépigna et applaudit l’artiste, visiblement heureux de se présenter devant un public acquis, impatient de partager des moments de belles émotions avec son idole.
La chanson tunisienne sur les ailes du désir.
En hommage à la vedette, un rutilant feu d’artifice tiré depuis les coulisses de théâtre a embrasé le ciel de Carthage.
Accompagné sur scène par une importante formation musicale en habit sombre, le «maâlem» (maître), conforme à son habitude, assis sur une chaise, a débuté son concert par un «daour» magistral soutenu par les florilèges passionnés d’un luth à la technique maitrisée.
En opérant dans ce registre familier, Bouchnak n’a pris, il est vrai, aucun risque, assumant toutes les difficultés et contournant avec une élégance vocale les aspérités de ce genre musical ardu.
Le public exulte, reprenant en choeur les refrains des chansons.
Dans la nuit carthaginoise, l’assistance, séduite et enthousiaste, n’a pas ménagé ses applaudissements.
Ce programme de «daour» et «foundou» alternait avec des chansons patriotiques et engagées; l’artiste trouvant à Carthage une tribune appropriée pour se placer en chantre des causes nationales, arabes et des droits de l’homme.
«L’artiste est une parole libre et militante, le précurseur dans tous les combats politiques en faveur des droits et des libertés spoliés», a-t-il lancé. L’écho de sa voix souleva un souffle ardent d’approbation.
Une clôture en apothéose
Sur un ton convenu, le chanteur poursuivit son tour de chant en rappelant à l’assistance la nécessité de faire acte citoyen en prenant part à la campagne de restauration des écoles publiques, menée par le ministère de l’Education nationale. Une louable initiative.
Habile communicateur, Lotfi Bouchnak sollicitait ce public hétérogène et imprévisible, en l’invitant à reprendre en sa compagnie les refrains de ses tubes a cappella. Une technique bien rodée pour une substitution de rôle, qui devient inappropriée lorsqu’elle devient fréquente.
Sonia Mbarek, directrice du festival de Carthage, ne pouvait rêver une clôture aussi réussie.
Le baladin dans son élégante «jebba» reprenait un programme festif, égrenant ses fameux tubes racontant une médina immémoriale, celle de son enfance, de Halfaouine à Bab Mnara en passant par Bab Souika, dans un style agréablement romancé, porté par les poèmes de ses compagnons de toujours, Ali Louati et Adam Fathi.
Il ne fallait pas tant pour que le public exulte, debout, reprenant en choeur les refrains des chansons, ne boudant pas le plaisir d’assister à une clôture en apothéose d’un festival où la fête fut totale avec un Lotfi Bouchnak «maâlam» comme à son habitude, époustouflant de maîtrise, qui sait transporter ses fans sur les ailes d’un désir toujours renouvelé.
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