La rencontre vendredi à la salle 4e Art avec le philosophe français Michel Onfray a été un grand moment de partage où la sincérité l’a disputé à l’audace.
Par Fawz Ben Ali
Après ‘Doc à Tunis’ et ‘Tunis Capitale de la Danse’, place aux mots qui résonnent avec le festival dédié à la parole : ‘Al-Kalimat’, qui s’inscrit dans la trilogie festivalière de l’association Ness El-Fan, et qui s’est tenu du 29 avril au 1er mai 2016.
Al-Kalimat a soufflé cette année sa 5e bougie et convié le public à réfléchir, trois jours durant, sur l’état du monde en mettant la lumière sur trois thématiques : «Que peut encore la littérature?»; «De chaque côté de la Méditerranée» et «L’autre Afrique».
Al-Kalimat, c’est parce qu’on a aussi vécu une révolution de la parole, qui a fait éclater des mots libres, justes et spontanés. C’est donc l’occasion de célébrer cet acquis, à travers la littérature, la poésie mais aussi la philosophie, avec un penseur, et pas des moindres, Michel Onfray.
A quoi bon voter ?
La salle le 4e Art, au centre-ville de Tunis, a accueilli, le soir du vendredi 29 avril, une rencontre avec le philosophe français Michel Onfray, avec comme modérateur l’écrivain et diplomate français Olivier Poivre d’Arvor.
Auteur d’une œuvre philosophique colossale, Michel Onfray s’est fait autant de partisans que de détracteurs. Sa plume très critique n’épargne presque personne : les religieux, les politiciens, voire des icônes tels que Jean-Paul Sartre ou Sigmund Freud.
Michel Onfray, Ghazi Ghrairi et Olivier Poivre d’Arvor.
Après la parution de son dernier livre ‘‘Penser l’Islam’’, l’homme libertaire et révolté, comme il souhaite se définir, vient à la rencontre des Tunisiens, et fut agréablement surpris d’avoir un si grand nombre d’admirateurs: «Je viens apprendre de ce peuple qu’on aime tant, mais qu’on connait mal; je n’ai pas de leçons à donner aux Tunisiens», dit-il.
Onfray n’a pas manqué de critiquer encore et toujours la politique étrangère de la France, qui s’est embarquée dans des guerres illégitimes contre des pays musulmans, ce qui constitue, selon lui, l’une des raisons de la montée du terrorisme. «Les pays occidentaux n’interviennent pas pour les droits de l’homme, comme ils le prétendent, mais pour des motifs purement géostratégiques et coloniales», explique-t-il.
Revenant sur les récentes critiques dont il a fait les frais après avoir annoncé son abstention au vote aux présidentielles 2017, Onfray nous dit : «A quoi bon voter si on change d’homme mais pas de politique? Les politiciens n’ont plus le sens de l’histoire; ils sont incapables de penser au-delà d’eux-mêmes».
Onfray s’est également expliqué sur l’amalgame qui s’était crée autours de ses orientations politiques, à savoir, s’il serait devenu un homme de droite, après avoir déclaré: «Je préfère une idée juste de droite à une idée fausse de gauche.» Une phrase que les médias n’ont pas manqué d’interpréter à leur guise afin de créer le buzz. A ce propos, Onfray affirme qu’il est toujours un homme de gauche, mais que «la gauche française a cessé d’être de gauche», dit-il.
Une université populaire en Tunisie
Michel Onfray, qui apparemment a aimé la Tunisie, nous a confié qu’il y retournerait prochainement, pour apporter les dernières touches à son prochain livre ‘‘Décadence’’, face à la mer de Carthage. Olivier Poivre d’Arvor nous a révélés que Michel Onfray serait même tenté de créer une université populaire en Tunisie.
La soirée s’est achevée avec une séance de dédicaces. Les plus chanceux ont eu droit à des selfies avec le plus populaire des philosophes.
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