Dans sa première création théâtrale, le jeune auteur et comédien Issam Ayari propose une réflexion sans complaisance sur la déchéance de l’homme moderne.
Par Fawz Ben Ali
Le nouveau festival ramadanesque des Arts du Lac met à l’honneur le théâtre tunisien en proposant un large éventail des dernières créations théâtrales.
Le soir du mercredi, l’amphithéâtre de Bab Al Bouhayra, aux Berges du Lac de Tunis, a accueilli un public, malheureusement pas très nombreux, venu découvrir le monodrame ‘‘Sapiens’’, écrit et joué par Issam Ayari, mis en scène par Walid Ayadi et produit pas Mohamed Karim Amri.
Une leçon de vie
Adepte de l’espace El-Teatro où il avait découvert sa passion pour l’art dramatique, Issam Ayari, qui n’a jusque là exercé son art qu’en tant qu’acteur, décide enfin de se lancer dans l’écriture. En six mois, il a réussi à finaliser son premier monodrame baptisé ‘‘Sapiens’’.
Au soir de sa vie, Sapiens, qui a atteint ses 45.000 ans, nous passe en revue l’évolution de l’humanité avec une distanciation lucide. Plus le personnage vieillit, plus il devient nostalgique du passé. Il nous entraîne alors dans une valse du temps orchestrée par des fragments de l’histoire de l’homo-sapiens, notre valeureux ancêtre.
Il ne s’agit pas d’une leçon d’histoire mais de vie. Le spectacle est une invitation au rire et à la réflexion, car Sapiens remet chacun de nous en cause et tourne en dérision tout citoyen du monde, encore moins le Tunisien, d’ailleurs la pièce nous parle, entre autres, de la Tunisie post-révolution, à travers un discours innovant et osé qui prend source dans notre langage quotidien, parfois le plus trivial et effronté.
Critique acerbe du monde moderne
Entre guerres, haine et violence, le bilan de ces 45.000 ans est désastreux, conclut Sapiens. L’humain n’est plus en harmonie avec le cosmos depuis qu’il a envahi le monde. En effet, les découvertes, les inventions et le progrès technologique n’ont pas fait de lui un homme meilleur et lui ont fait perdre sa sagesse.
Sapiens renvoie à sa véritable condition à travers une critique acerbe de notre monde actuel de plus en plus artificiel, meurtrier, déraciné et coupé de ses origines. «Moi Sapiens, ne peux plus vivre avec des gens comme ça!», nous-crie-t-il.
La pièce appelle à un retour aux sources, d’ailleurs Sapiens confie qu’il n’aurait peut-être jamais dû quitter sa caverne, «le temps des chasseurs-cueilleurs fût l’âge d’or de l’humanité, là où il n’y avait pas encore la notion de licite et d’illicite», dit-il avec un mélange de nostalgie et de regret.
Passionnante, hilarante et parfois contrariante, la pièce grouille de sujets, notamment la naïveté de l’homme moderne à l’instar de sa pratique de la religion : «On croit à des mensonges que nous avons créés nous-mêmes.» La démocratie et les droits de l’homme relèvent aussi de la fiction, martèle le personnage.
Dans le cadre des Arts du Lac, les amateurs du 4e art pourront découvrir également ‘‘Tarchika’’ de Leïla Chebbi, ‘‘Jaafour show’’ de Jaafar Guesmi, ‘‘Farka saboun’’ de Moez Toumi et Aziza Boulabyar, ‘‘Ahna haka’’ de Kamel Touati et ‘‘Don Quichotte’’ de Walid Taghsni.
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