Tout médecin tunisien sait désormais qu’il est en liberté provisoire et qu’il peut être jeté en prison, à tout moment, par une justice expéditive, sur une simple dénonciation calomnieuse.
Par Dr Moez Ben Salem *
Les martyrs qui ont donné leur sang pour que le Tunisie puisse se débarrasser du dictateur Ben Ali se retourneraient sûrement dans leur tombe s’ils pouvaient savoir que, six années après le sacrifice de leur vie, leurs compatriotes entreprendraient de détruire méthodiquement leur pays, en y introduisant le terrorisme d’abord, ensuite en mettant à mort son économie, son système éducatif et pour finir, son système de santé.
Un grave déraillement médiatique et judiciaire
En effet, en ce 6 février 2017, qui commémore l’assassinat demeuré impuni de Chokri Belaid, alors que l’on essaie de rapatrier en douce les terroristes qui ont sévi en Syrie, Irak et Libye, voilà que se produit un très grave déraillement médiatique et judiciaire qui fait que deux médecins croupissent en prison, au moment même où les terroristes se retrouvent libres comme le vent !
Le premier cas de ce déraillement concerne un médecin urgentiste exerçant dans une clinique à Gabès. Suite à un accident transfusionnel qui aurait pu arriver dans n’importe quel pays du monde, qui a causé le déplorable décès d’un citoyen tunisien, ce médecin a été jeté en prison par décision rapide d’un juge d’instruction qui n’a pas voulu attendre les résultats de l’enquête judiciaire.
A la suite de cette arrestation, le médecin urgentiste a été victime d’un accident cardiaque et c’est menottes aux mains qu’il a été transféré à l’hôpital militaire de Tunis pour y subir des soins intensifs, comme si dans son lit d’hôpital, il pouvait représenter un quelconque danger pour la société tunisienne.
Une nouvelle forme de justice à la Lucky Luke
Presque au même moment, dans un hôpital de Sousse, un bébé né prématurément au 6e mois est décédé en dépit des soins prodigués par la jeune résidente de service. Sauf qu’un véritable déchaînement médiatique, déclenché par certains médias à sensation, a monté de toutes pièces une histoire abracadabrante de bébé ayant survenu à une congélation dans une morgue.
Suite à cela, le juge d’instruction a immédiatement jeté la pauvre résidente en prison, juste pour calmer une opinion publique manipulée et déchaînée.
Qu’importe si la jeune résidente a faite correctement son travail ou pas, on assiste désormais une nouvelle forme de justice à la Lucky Luke : «On pend d’abord, on juge après»!
Du côté des médias à sensation, qu’importe que leur manque de professionnalisme ait pu conduire une innocente en prison, cela ne les empêchera pas de dormir !
Devant cette campagne savamment orchestrée visant à diaboliser l’ensemble du corps médical tunisien, il ne reste plus désormais pour les médecins tunisiens qu’une seule issue : l’exode vers des pays qui sont tout contents de les accueillir!
D’ailleurs, lors du dernier concours d’équivalence pour obtenir le droit d’exercer en France, les médecins tunisiens ont raflé le tiers des places.
Tout médecin tunisien sait désormais que dans son pays, il n’est qu’en liberté provisoire et qu’il peut être peut être immédiatement jeté en prison, sans décision de justice, sur la base d’une simple dénonciation calomnieuse.
El le citoyen tunisien dans tout cela? Il se laisse manipuler à sa guise, mais lorsque dans quelques années il réalisera que le système de santé en Tunisie a été complètement détruit, il ne lui restera plus que ses yeux pour pleurer !
A bon entendeur !
* Médecin de libre pratique.
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