Les islamistes s’emparent de l’Instance Vérité et Dignité (IVD) pour faire un procès posthume à Bourguiba. C’est finalement leur petitesse qu’ils révèlent.
Par Mohamed Rebai *
Dix sept ans après sa mort (le 6 avril 2000), l’ombre de Bourguiba, l’un des grands hommes de notre temps, dérange encore. Six ans après la révolution «de la brouette», on n’a pas fini de le «tuer» à coup de déclarations mensongères et de manipulations des masses. Mais on n’a jamais réussi à noircir son image dans notre mémoire de Tunisiens. Habib Bourguiba, le bâtisseur de la Tunisie moderne, est à jamais dans nos cœurs. C’est définitif et irréversible.
Six ans de mensonges officiels
Vous perdez votre temps, Rached Ghannouchi, leader des islamistes tunisiens, vous ne serez jamais de la même trempe du «zaim» (leader) Bourguiba. Vous ne boxez pas dans la même catégorie, sinon vous allez être vite en être de vos frais. Car on ne peut pas être juge et partie en même temps. L’histoire étant un éternel recommencement, dans quelques années, d’autres dirigeants vous jugeront de la même manière sinon pire. Car, contrairement à Bourguiba, votre bilan est très négatif.
Le mieux serait que vous vous occupiez d’une économie au bord de la faillite, d’une santé malade, d’une éducation publique livrée aux voyous, des grèves tournantes qui minent le pays et des terroristes qui n’ont pas fini de faire tomber nos valeureux soldats et agents de sécurité dans des guet-apens. Redresser l’autorité de l’Etat devrait être votre principal leitmotiv. Appliquer les lois de la république qui existent déjà sans la «bénédiction» du cheikh pour réprimer les contrebandiers et les corrompus serait à votre honneur.
Vous n’avez jamais compris que l’inflation galopante a sérieusement affecté les quatre postes budgétaires de base d’un foyer (alimentation, logement, vêtement et santé). Des fois, la santé est sacrifiée au profit d’autres besoins pressants. De mon vivant, la situation n’a jamais été pire qu’aujourd’hui.
Six ans de mensonges officiels c’est déjà interminable. On n’a jamais vu une folie destructive de la mémoire tunisienne. Partout les structures de l’Etat tombent les unes après les autres. Nous continuons à virer dans une sorte de théocratie «soft», préalable à une autre «hard» ouvrant la voie au califat héréditaire et absolutiste réservé à une seule famille.
Ennahdha utilisent l’IVD de Sihem Bensedrine pour régler leurs vieux comptes politiques.
Les procès posthumes déshonorent leurs instigateurs
On a donné blanc-seing à la puritaine «troïka», l’ancienne coalition gouvernementale dominée par le parti islamiste Ennahdha. Ils n’ont rien fait que de pomper l’argent des contribuables. Très vite, la situation des pauvres devient préoccupante et terrible. la classe moyenne s’appauvrit de jour en jour. Les gens arrivent difficilement à joindre les deux bouts. Le pays est au bord du gouffre. La crise est partout. On n’en voit même pas l’issue.
On découvre que les Tunisiens se révèlent impuissants à maîtriser leur destin malgré une pléthore de partis politiques. Ce n’est pas la population qui est devenue indifférente, ce sont les moyens de pression dont elle dispose qui sont devenus inefficaces face à un pouvoir de plus en plus isolé. Il faudrait peut-être s’inventer de nouvelles méthodes, de nouveaux outils et de bons leaders pour imposer le changement.
La vie ici ressemble à une pièce du dramaturge Strindberg où des hommes hystériques s’acharnent contre leur propre pays. Le mal qu’ils ont causé intra et extra-muros en peu de temps est si profond et grave qu’il faudra bien longtemps pour le réparer.
Les Destouriens palanqués qui font chambre à part se taisent et ne réagissent pas au procès «posthume» de leur leader Bourguiba. Si jamais une page de notre pays est tournée. Les historiens nous le diront. Sur celle qui s’ouvre, écrivons ensemble : reconstruisons notre pays par le travail, le sérieux et l’abnégation. La rancune et l’animosité qui résultent de la stupidité nous empêchent de vivre ensemble et ne nous inspire que dégoût et cynisme.
* Universitaire.
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