Faire d’un gentil garçon, qui est d’accord avec tout le monde, un candidat à la présidentielle, ce n’est plus de la Com’, cela devient du bluff.
Par Chedly Mamoghli *
Détachons-nous l’espace d’un temps du nombrilisme qui caractérise hélas un bon nombre de nos compatriotes qui croient que l’univers gravite autour de nous. Intéressons-nous à l’élection présidentielle française.
Comme nous vivons dans un monde globalisé, que nos relations internationales demeurent très peu diversifiées et fortement focalisées vers l’Europe et spécifiquement la France et bien naturellement, nous devons décortiquer cette échéance qui désignera le futur locataire de l’Élysée.
Un Rastignac, prêt à tout pour réussir
Évidement la star incontestée de cette campagne, la coqueluche des médias, des «trendy people» et de tous ceux qui veulent faire croire qu’ils sont pour le changement, c’est Emmanuel Macron. Nul doute que le concerné aligne un bon parcours et qu’il a parfaitement le droit d’être ambitieux. Qui n’a pas d’ambitions? Uniquement les médiocres n’en ont pas. Mais faut-il avoir les moyens de ses ambitions. Une ambition poussée à son paroxysme en fait un Rastignac, ce personnage de Balzac prêt à tout pour réussir.
Il ne suffit pas d’avoir entrepris de bonnes études, de savoir parler et d’avoir une tête sympathique pour devenir président de la république. Ce poste requiert avant tout l’expérience, grande et variée, également avoir été confronté à des situations difficiles et cruciales. Bref, il faut être un homme d’État pour mériter de devenir président et pour être digne de cette fonction. Et c’est là, la carence majeure d’Emmanuel Macron, il manque cruellement d’expérience. Par conséquent, la question s’impose, elle est inévitable: Macron peut-il gouverner la France?
Avec un CV de deux ans chez David Rothschild et deux ans au gouvernement, est-ce suffisant pour devenir chef d’État et de surcroît d’un pays comme la France, cinquième puissance mondiale?
Autre question cruciale et centrale, une question institutionnelle, comment va-t-il gouverner et comment va-t-il faire passer ses projets de loi en l’absence de majorité parlementaire? Ou bien va-t-il faire du bricolage pour se doter d’une majorité en ramassant quelques girouettes du parti socialiste et quelques opportunistes des Républicains (ex-UMP)? Ou bien va-t-il gouverner avec le 49.3?
Bref, entre manque cruel d’expérience et flou total de la manière dont il va gouverner, c’est l’aventure avec Emmanuel Macron. C’est du jamais vu sous la Ve République! La démocratie est basée sur des partis, un parti majoritaire gouverne et un autre est dans l’Opposition. Mais lui, il n’a pas de parti, comment va-t-il gouverner? Son projet est incohérent avec la Constitution de la Ve République, il est démagogique.
De plus, il veut ratisser large, de l’extrême gauche marxiste aux libéraux. Il a embarqué avec lui à la fois Robert Hue, ancien secrétaire général du Parti communiste français et successeur de Georges Marché, et Alain Madelin, l’icône de la droite libérale, anti-communiste viscéral et fondateur de Démocratie libérale.
Un mouvement attrape-tout
Comment bâtir un programme surtout économique avec deux visions antagonistes? Nul ne peut répondre. À telle enseigne que c’est devenu un réflexe chez lui, tellement son mouvement est devenu un mouvement attrape-tout qu’à chaque fois qu’une personne l’interroge sur une thématique, il lui répond qu’il partage son avis. D’ailleurs lors du débat de mardi soir, un des candidats François Asselineau lui dit: «Vous êtes toujours d’accord avec tout le monde» et toute la salle y compris les candidats ont éclaté de rire.
Sérieusement, les électeurs doivent se poser ces questions fondamentales. Autant il bouge, il gesticule, il veut embobiner tout le monde, mettre tout le monde dans sa poche, autant sur son programme, il est silencieux, flou et creux. Cette stratégie de «Venez à moi et verrez pourquoi après la victoire» est une arnaque. D’autant plus qu’il ne peut pas prétendre être le candidat du renouveau, il n’y a que les amnésiques pour le croire. Il a fait partie de l’équipe de campagne du candidat Hollande en 2012, a dessiné les contours de son programme économique, l’a accompagné à l’Élysée, a été son chouchou, il l’a désigné à Bercy. C’est un pur produit hollandais Emmanuel Macron. Donc faire croire qu’il incarne le changement et le renouveau, ça fait plutôt rire.
Tous ces éléments nous permettent de mieux comprendre cette candidature, de mieux la cerner, de mieux la saisir et de s’interroger sereinement au lieu de céder à ce phénomène médiatique que l’establishment veut absolument imposer et faire de l’élection une simple formalité. On n’élit pas un candidat parce qu’il a une tête d’un gentil petit garçon et parce qu’il y a un effet de mode fabriqué de toutes pièces autour de lui. Ce n’est plus de la Com’, cela devient du bluff.
* Juriste.
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