Une éducatrice tire la sonnette d’alarme sur des agressions contre les enfants qu’elle a observées dans un centre éducatif pour handicapés à El-Mourouj 3 (banlieue sud de Tunis).
Hanene (pseudonyme), étudiante de 21 ans, a confié à Kapitalis qu’une plainte a été déposée contre le centre privé par la délégation de la protection de l’enfance et que le procès est prévu pour le 9 novembre 2017.
La jeune fille a découvert, lors d’un stage dans cet établissement durant l’été 2015, que les enfants pensionnaires sont victimes de violences quasi-quotidiennes. Les éducatrices les frappent avec des bâtons et leur donnent des coups de pied, de poing et leur infligent d’autre sortes de torture. «Ils sont malades et pour les calmer, il faut prendre le dessus, sinon ils deviennent ingérables», prétextent-elles, le plus sérieusement du monde.
Selon notre interlocutrice, c’est la directrice du centre, orthophoniste de son état, qui permet aux éducatrices d’être violentes, estimant, elle aussi, que c’est le seul moyen pour les gérer et instaurer la discipline en classe.
«Les enfants sont déjà angoissés et au lieu de les rassurer et de les prendre en charge comme il se doit, on nous demande de les frapper. Cela les rend agressifs même entre eux», déplore Hanene, qui ne comprend pas pourquoi la directrice du centre n’a-t-elle pas été inquiétée, bien qu’elle n’est pas exempte de reproche elle aussi.
En effet, seules les 2 éducatrices, filmées à leur insu par Hanene, ont été convoquées par la justice. D’ailleurs, les autorités n’ont pas renouvelé cette année l’autorisation du centre. Pour justifier cette fermeture sans perdre la face, la direction a indiqué qu’elle a été contrainte de fermer parce que les parents ne paient pas…
«Si je mets cette histoire au grand jour, c’est pour prévenir les parents de ce qu’ont subi leurs enfants et les encourager à suivre cette affaire car je n’ai filmé que quelques scènes, or pratiquement tous les enfants ont été violentés dans ce centre», explique l’éducatrice, en ajoutant qu’aucune règle pédagogique n’y est suivie et que les trisomiques, les autistes, les retardés mentaux et autres sont tous mélangés dans la même classe, où les activités et les ateliers sont organisés sans aucun savoir-faire.
«Les éducatrices, titulaires d’une maîtrise en géographie et en économie, veulent parfois contredire les diagnostics des médecins spécialistes, en disant que tel enfant a besoin d’éducation et qu’il ne porte aucun handicap mental, se permettant alors de se montrer très violentes pour justement, soi-disant, l’éduquer», raconte encore Hanene, qui explique aussi que les enfants ayant des problèmes d’incontinence sont placés sur des pots toute la journée, pour épargner aux éducatrices la corvée du changement des couches. Pis encore: si un enfant à un stéréotype, on ne lui apprendrait pas à s’en débarrasser, mais on l’attache et on le violente. «C’est pour son bien puisqu’il ne parle pas donc il ne dira rien aux parents», a-t-on expliqué à l’étudiante, lorsqu’elle a fait part à l’administration de son indignation…
Yüsra Nemlaghi
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