L’Angleterre a décidé un boycott diplomatique de la Coupe du monde en Russie, mais la Fédération anglaise de football ne peut pas refuser d’y participer. Explications…
Par Hassen Mzoughi
Pour comprendre, il faut d’abord connaître le statut bien particulier de la Fédération internationale de football association (Fifa), organisatrice de la Coupe du monde, qui se place au-dessus des Etats.
Plus important aussi, la charte de la Fifa interdit vigoureusement l’ingérence des Etats dans les affaires du football et les conséquences d’éventuels conflits diplomatiques sur le football. Selon cette charte applicable à tous les pays, une fédération nationale doit être «autonome et non soumise à une entité gouvernementale».
Un énorme enjeu sportif
Si la fédération anglaise choisissait finalement de faire l’impasse sur la Coupe du monde en Russie, cet été, elle risquerait une suspension pour les deux coupes du monde suivantes et des interdictions de participation à plusieurs compétitions organisées par la Fifa ainsi qu’une lourde sanction financière.
L’Angleterre ne pourra se permettre un tel isolement sportif et surtout une longue absence au plus haut niveau alors que son football connaît une belle dynamique avec l’arrivée d’une génération talentueuse capable de s’imposer dans la haute hiérarchie mondiale.
La sélection anglaise a donc beaucoup à perdre sur le plan sportif en cas de boycott. Dotée d’une génération douée, en tête de laquelle les excellents Harry Kane, Dele Alli ou encore Marcus Rashford, elle a une bonne carte à jouer dans le Mondial de Russie.
En plus, elle a une chance double. La première, c’est qu’elle est tombée au premier tour avec la Tunisie, le Panama et la Belgique avec laquelle elle devrait se disputer la première place. La seconde est tout aussi importante puisqu’elle est en lien avec la première : en cas de qualification, les Anglais affronteraient en huitième de finale le premier ou le deuxième du groupe H, dans lequel figurent la Colombie, la Pologne, le Sénégal et le Japon – des équipes largement à leur portée. De quoi nourrir l’espoir de retrouver les quarts de finale, douze ans après une élimination douloureuse contre le Portugal aux tirs au but à ce même stade.
Les champions du monde 1966 ont aussi envie de se réhabiliter après le fiasco du Mondial 2014, où ils avaient terminé derniers de leur groupe avec un seul point, derrière le Costa Rica (7 points), l’Uruguay (6 points) et l’Italie (3 points).
Un énorme enjeu financier
Qui dit football de haut niveau, dit aussi argent. Entre les droits de diffusion télé, les sponsors et les contrats de publicité, les enjeux financiers de la Coupe du monde sont gigantesques. Un boycott pourrait causer la perte de nombreuses recettes juteuses pour la fédération anglaise.
Les droits télé signés par les chaînes anglaises devraient atteindre des sommes astronomiques. Rien que pour la Premier League, sur la période 2016-2019, ces droits ont été négociés pour 2,3 milliards d’euros par an.
Aucune grande nation n’est encore allée jusqu’à snober une grande compétition, même en 78, quand la Coupe du monde était organisée par l’Argentine dirigée par la dictature militaire. La communauté internationale a réclamé le boycott général de la compétition mais toutes les fédérations y ont pris part et elle s’est terminée par le triomphe de… l’Argentine, avec laquelle la Grande-Bretagne était en conflit à propos des îles Malouines.
Ainsi, après avoir laissé entendre qu’elle pourrait empêcher sa sélection d’aller au Mondial en Russie, l’Angleterre se contente de ne pas y envoyer de représentation diplomatique.
Malgré les tensions avec la Russie, l’équipe d’Angleterre devra participer à la compétition du 14 juin au 15 juillet 2018. Le boycott est un pari trop risqué pour le pays du football. Il ne servira surtout à rien sauf empêcher une grande sélection de participer à la kermesse mondiale du football.
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