Dans une note intitulée «Inflation et taux d’intérêts : l’échec du FMI», rédigée par son président, l’économiste Chafik Ben Rouine, l’Observateur tunisien de l’économie (OTE) affirme que le taux d’inflation en Tunisie a atteint 7,7 % en mai 2018, un niveau jamais atteint depuis 1991.
Citant le dernier communiqué du Fonds monétaire international (FMI) concernant la Tunisie, publié le 30 mai 2018, où il déclare que «des mesures décisives sont nécessaires cette année pour lutter contre l’inflation», la note rappelle que l’inflation a atteint 7,7 % en mai 2018, «un niveau jamais atteint depuis 1991, année où la Tunisie était également sous ajustement structurel du FMI dans le cadre d’un Mécanisme élargi de crédit (1988-1992).»
Selon M. Ben Rouine, «le premier tournant de l’inflation se situe autour d’avril 2016», mois au cours duquel, rappelle-t-il, «le FMI avait imposé à la Tunisie de faire passer la loi sur l’indépendance de la Banque centrale de Tunisie (BCT) avec pour mission principale de lutter contre l’inflation tout en libéralisant le dinar.»
Pour le président de l’OTE, «ce changement structurel s’est matérialisé par la publication, le 10 mars 2017, mois où le dinar a subi son plus grand décrochage, d’une circulaire de la BCT instituant sa nouvelle politique monétaire inspirée de l’idéologie du FMI.»
Cette idéologie, estime M. Ben Rouine, «veut que l’inflation soit partout et toujours d’origine monétaire, c’est-à-dire qu’elle ne peut provenir que d’une trop grande distribution de crédits.»
Selon les recettes du FMI, la lutte contre l’inflation d’origine monétaire nécessite l’augmentation des taux d’intérêt pour réduire l’inflation. Or, la réalité en Tunisie est tout autre, souligne l’économiste.
«L’inflation en Tunisie a augmenté principalement avec la libéralisation du dinar en avril 2016 puis s’est accélérée notamment après le décrochage du dinar de mars 2017. Nous avons calculé qu’entre janvier 2013 et mars 2016, le coefficient de corrélation entre l’inflation et le taux de change TND/EUR était faible (0,25) tandis qu’il est devenu très fort entre avril 2016 et mai 2018 (-0,91). Ces chiffres appuient ainsi notre interprétation que l’inflation est due principalement à la libéralisation du dinar puis à la chute de sa valeur qui augmente les prix des biens importés», souligne M. Ben Rouine, qui en veut pour preuve, l’absence d’impact sur l’inflation de l’augmentation du taux directeur de la BCT en avril et mai 2017
Conclusion de l’économiste : «En réalité, l’inflation n’a jamais été aussi grande que depuis que le FMI a imposé à la BCT de ne se focaliser que sur la lutte contre l’inflation». Seconde conclusion : «L’échec de la politique monétaire promue par le FMI est donc total. Non seulement l’inflation n’est pas monétaire, mais elle est issue directement des politiques imposées par le FMI (libéralisation du dinar, augmentation de la TVA et des prix de l’essence). De plus, dans sa deuxième revue, le FMI reconnaît que l’augmentation des taux d’intérêt n’a aucun impact sur la demande de crédit (point 15). En attendant, l’inflation et l’augmentation des taux d’intérêt sont en train d’étouffer financièrement les ménages et les entreprises en Tunisie. Il devient urgent de redéfinir la mission de la BCT en l’adaptant aux besoins de l’économie tunisienne (chômage, croissance, investissement) plutôt qu’à l’idéologie du FMI.»
I. B. (avec communiqué).
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